Le Sénat a rétabli lundi, à une voix de majorité, le délit de racolage initialement abrogé par la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre la prostitution.
162 sénateurs -142 UMP et 19 UDI-UC- ont voté pour un amendement en ce sens du président de la commission spéciale Jean-Pierre Vial (UMP) à l'occasion de l'examen du texte en première lecture. En revanche 161 ont voté contre: 12 centristes, et les membres des groupes socialiste, CRC (Communiste, républicain et citoyen), RDSE (à majorité PRG) et écologiste.
"Je m'abstiendrai", a dit pour sa part Jean-Pierre Godefroy (PS) qui avait présidé la commission spéciale avant d'en démissionner. "Je ne peux m'engager immédiatement sans savoir ce qu'il adviendra de l'article 16" qui concerne la pénalisation des clients, autre point fort du texte.
La proposition de loi prévoyait initialement d'abroger le délit de racolage instauré par Nicolas Sarkozy, et d'instaurer en contrepartie la pénalisation des clients. La commission spéciale du Sénat a réintégré le délit de racolage, pourtant décrié par les associations sur le terrain, et a rejeté la sanction des clients.
"La loi qui a créé le délit de racolage passif visait à maintenir la tranquillité publique en limitant la visibilité des prostituées et à obtenir des informations sur les réseaux", a souligné Laurence Cohen (CRC). "Mais cette infraction n'a pas conduit à multiplier les arrestations de proxénètes (..). Elle n'a abouti qu'à fragiliser les personnes prostituées".
Pour Esther Benbassa (écologiste), les conséquences du délit de racolage "sont terribles pour les personnes prostituées: dégradation de leur état de santé, isolement, vulnérabilité accrue liée à la prostitution indoor - en appartement, bar, salon de massage, par internet, etc". "Il est tout bonnement impensable de rétablir ce délit qui a fait, en douze ans, la preuve de son inutilité en matière de répression des réseaux et de dangerosité à l'égard des personnes prostituées", a-t-elle poursuivi.
"Cet amendement marque un véritable coup d'arrêt à une possible amélioration des conditions de vie des personnes prostituées", a estimé Claudine Lepage (PS).
En revanche, pour M. Vial, "les forces de l'ordre doivent avoir les moyens de remonter les réseaux". "Sans l'établissement de ce délit, nous nous trouverions en état d'apesanteur", a-t-il estimé.
Pour Joëlle Garriaud-Maylam (UMP), "le délit de racolage offre une ressource aux services de police. Pour aider ces femmes, il faut d'abord les identifier".
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