La tâche des jurés ne sera pas facile mercredi: dans un réquisitoire implacable devant les assises du Rhône, l'avocat général Jean-Paul Gandolière a estimé que Gabriel Iacono avait bien été abusé par son grand-père, sans toutefois requérir de peine.
"J'ai conscience de la lourdeur de votre mission, vous devrez dans votre délibéré rendre la justice qui n'est pas faite pour faire plaisir", a prévenu le magistrat. Pas une seule fois durant son réquisitoire il n'aura remis en cause la véracité de "l'inceste", mot répété à trois reprises, ni les propos de Gabriel enfant, alors que le Gabriel adulte s'est rétracté avec fracas il y a quatre ans.
Ces rétractations avaient conduit en février 2014 à l'annulation rarissime -devant la cour de révision- de la condamnation de Christian Iacono, ex-maire de Vence (Alpes-Maritimes), à 9 ans de prison pour viols de son petit-fils.
"Vous n'êtes pas ici une chambre d'enregistrement, l'acquittement n'est pas un principe inéluctable, il faut réexaminer la totalité du dossier", a prévenu l'avocat général, à l'adresse des jurés.
Selon lui, "Gabriel a bien été victime d'abus sexuels, l'auteur en est son grand-père Christian Iacono, c'est la seule explication rationnelle".
Et de citer plusieurs éléments "qui viennent corroborer" la véracité selon lui des agressions sexuelles dénoncées par l'enfant en juin 2000, et constatées par des experts: lésions à l'anus, comportement très perturbé, volonté de protéger son petit cousin +pour qu'il ne se fasse pas lui aussi agresser+, tentatives de suicide.
"Il a les cicatrices d'actes de sodomisation, ce n'était pas des lésions de grattage comme on a pu l'entendre. Gabriel voulait protéger Adrien son cousin (de son grand-père), c'est une réaction typique de victime d'agression sexuelle", a détaillé l'avocat général, complétant sa litanie par l'évocation d'un syndrome post-traumatique chez l'enfant.
- Gabriel aux abois -
"Il s'est mis un couteau sous la gorge, il allait de plus en plus mal cet enfant!" a relevé, ému, M. Gandolière, balayant les propos de la défense imputant ces crises au divorce des parents de Gabriel et au climat délétère dans la famille Iacono.
Le petit-fils aujourd'hui âgé de 24 ans, a pourtant répété lundi à la barre sa peine de ne pas être cru: "J'ai beau essayer de réparer, de dire la vérité et on ne veut pas m'entendre", a dit le jeune homme, d'une voix sûre.
"Je l'accusais d'horreurs, ce n'est pas une belle image que je fais de mon grand-père qui est une personne notable", a aussi plaidé Gabriel. Il a expliqué son mal être par "l'ambiance familiale", son propre père n'adressant plus la parole au grand-père depuis près de 20 ans. "Tout est une souffrance pour moi", s'est encore plaint Gabriel.
Après avoir accusé pendant 11 ans son grand-père de viols et attouchements sexuels pour des faits qui auraient eu lieu dans sa villa à Vence entre 1996-1998 environ, Gabriel s'était rétracté début mai 2011 dans une lettre à la justice.
Mais pour l'avocat général, à cette époque en 2011, Gabriel "est aux abois", car il était surendetté. La commission de surendettement avait rejeté son dossier quasiment le même jour que la rétractation, selon le magistrat. De même, Gabriel vivait chez sa tante (soutien active du grand-père) "qui lui assurait gîte et le couvert" et lui avait trouvé un avocat. "Tout cela n'est pas un contexte très propice à une rétractation", a relevé, mine de rien, l'avocat général.
Verdict mercredi soir après les plaidoiries de la défense.
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