Le "Portrait d'Innocent X" ou "La Tunique de Joseph" : ces chefs d'?uvre de Velazquez sont présentés au Grand Palais à Paris pour une première rétrospective en France réunissant une cinquantaine de tableaux, quasiment la moitié de la production de ce génie de la peinture.
Q. Pourquoi Velazquez est-il l'un des plus grands portraitistes de l'art occidental ?
R. "Trop vrai": c'est ainsi que le pape Innocent X aurait qualifié son célèbre portrait. De fait, quel que soit leur modèle, les portraits de Diego Rodriguez de Silva y Velazquez sont extraordinairement vivants et expriment la vérité des personnages.
"Velazquez va renouveler et régénérer le genre, marqué en Espagne par une tradition glacée, rigide", souligne Guillaume Kientz, commissaire de l'exposition. Il peint les puissants mais aussi les nains, les bouffons ou d'autres artistes, et à l'instar de leur liberté de ton, se livre à des expérimentations impensables avec l'image des souverains espagnols.
En témoigne le "Portrait de Pablo de Valladolid", bouffon célèbre représenté en gentilhomme. "Le fond disparaît, c'est de l'air qui entoure ce bonhomme tout habillé de noir et vivant", écrit Edouard Manet de retour de Madrid.
Velazquez "a fait très peu de dessins, il fonce, il corrige ses compositions en les peignant, dessine au pinceau noir, quitte à changer d'avis en cours de route", explique Guillaume Kientz.
Mais il est tout aussi virtuose s'il s'agit de sujets religieux ("L'immaculée Conception"), mythologiques ("la Forge de Vulcain") ou des "bodegones", ces scènes d'auberge alors en vogue en Espagne ("La Mulata"). Sans oublier le nu, rare dans l'art espagnol de cette époque ("La Vénus au miroir").
Q. Quelles ont été sa formation, ses influences ?
R. Velazquez entre à douze ans dans l'atelier du peintre sévillan Francisco Pacheco, animateur d'une académie réunissant les meilleurs esprits de la ville. Lors d'un voyage à Madrid, il entre en contact avec le caravagisme, venu d'Italie, "qui adoucit son naturalisme très trivial, violent" et rend sa peinture "plus poétique", souligne Guillaume Kientz. Devenu peintre du roi à Madrid, Velazquez rencontre Rubens qui persuade Philippe IV d'envoyer le jeune artiste en Italie.
Vers 1630, il peint à Rome deux magistrales compositions, présentées en vis-à-vis à l'exposition, où "il se confronte aux plus grandes tendances picturales du temps" : le caravagisme finissant avec "La Forge de Vulcain" et l'influence de Pierre de Cortone ou de Nicolas Poussin, manifeste dans le choix des couleurs, avec "La Tunique de Joseph".
Velazquez n'a pas fait école mais son gendre, Juan Bautista Martinez del Mazo, est son disciple le plus brillant comme le montrent une quinzaine de ses toiles, dont une réduction des Ménines où le couple royal a disparu.
Plus près de nous, il n'a pas manqué d'admirateurs: Goya, Delacroix ("j'en suis tout possédé"), Manet, Bacon et Picasso ("Velazquez est le vrai peintre de la réalité").
Q. Velazquez est-il un homme de cour ?
R. "Il n'y a pas une once de subversion chez lui, relève Guillaume Kientz. C'est un familier du roi, qui vient le voir tous les jours, mais pas un ami. Son crédit auprès du souverain, qui ne lui cède pas tout, lui donne de l'importance". En 1652, il est nommé maréchal du Palais, une charge importante qui le détourne de la peinture. Il va pourtant produire pendant ces années "Les Fileuses" et "Les Ménines".
Quant à ses revenus, il vivait bien mais difficile de dire s'il était riche.
Q. Que sait-on de l'homme Velazquez ?
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