Peu d'élections régionales auront été aussi suivies en Espagne et à l'étranger. Ce dimanche, les Andalous seront les premiers à dire si le parti antilibéral Podemos, allié du Grec Syriza, est en mesure de transformer l'essai, lors du coup d'envoi d'une année électorale décisive.
L'Andalousie, 8,4 millions d'habitants, connue pour ses plages bondées, ses villages blanchis à la chaux écrasés de chaleur, sa ferveur religieuse et la joie de ses habitants, a commencé à voter dimanche pour renouveler son Parlement. Des régionales anticipées, fruit d'une crise entre le Parti socialiste (PSOE) et les écolo-communistes d'Izquierda Unida.
Près de 6,5 millions d'électeurs sont appelés à choisir entre les options classiques, le PSOE ou le Parti populaire (droite), et les nouvelles: Podemos, classé très à gauche, et Ciudadanos, de centre droit, qui bousculent l'échiquier en dénonçant l'austérité ou la corruption touchant les élites.
Après six années de crise et d'enlisement, ces formations ont toutes eu recours à un même mot dans leurs campagnes: "changement". "Le changement sûr", pour le PSOE qui invite les électeurs à ne pas se lancer dans des "expérimentations"; le "changement tranquille" avec le PP qui insiste sur la reprise de la croissance (+1,4%), ou encore le "changement irréversible" de Podemos.
"Tout le monde attend de voir si les forces émergentes vont obtenir un très bon résultat", déclarait samedi à l'AFP un membre haut placé du PP.
"Cela va servir de test", ajoutait-il en évoquant d'autres scrutins à venir: régionales et municipales en mai, une nouvelle régionale anticipée en Catalogne en septembre et enfin les législatives, à la fin de l'année, où les conservateurs sont menacés de perdre leur majorité.
En Andalousie, bastion des socialistes depuis 30 ans, résume-t-il, c'est le PSOE qui a le plus à perdre "si le résultat de Podemos est très fort".
Le PP est menacé par Ciudadanos et a tenté cette dernière semaine de convaincre ses électeurs de leur préférer le vote "utile".
L'enjeu symbolique est de taille. Vendredi, le chef du gouvernement Mariano Rajoy (PP), comme le chef du PSOE Pedro Sanchez, Pablo Iglesias de Podemos, et Albert Rivera de Ciudadanos étaient tous en Andalousie pour clore la campagne.
- Région sinistrée -
Ici, la crise a frappé plus encore qu'ailleurs, dévastant le secteur de la construction après l'éclatement en 2008 de la bulle immobilière qui faisait pousser les complexes immobiliers comme des champignons tout au long de la côte et donnait du travail facile à beaucoup. L'agriculture, qui occupe environ 500.000 journaliers, n'a pas pu compenser.
Plus d'1,3 million de personnes sont sans emploi, soit 34,2%, un record européen au niveau régional. Des dizaines de milliers ont repris le chemin de l'émigration, comme dans l'Espagne pauvre des années 1960. D'autres, parmi les jeunes, traînent sans étudier ni travailler (les "ni-ni"), battant des records de décrochage scolaire et de chômage (six jeunes sur dix).
Un sombre tableau qui, selon les sondages, ne fera pas perdre sa majorité au Parti socialiste andalou mais l'obligera à s'allier. Selon une enquête publiée le 14 mars par El Pais, il obtiendrait 36,7% des voix, devant le Parti populaire (droite) au pouvoir en Espagne (25,1%) et Podemos, qui n'arrive que troisième (14,7%) alors qu'au niveau national il se hisse en deuxième ou première position.
Podemos, en dépit des enquêtes, continuait vendredi à parier sur la victoire. "Nous avons déjà gagné!", a crié sa principale candidate en Andalousie, l'euro-députée Teresa Rodriguez, devant quelque 15.000 personnes rassemblées au vélodrome de Séville, traditionnellement utilisé par le Parti socialiste.
"Dimanche, tous les Espagnols aimeraient être Andalous pour pouvoir voter Podemos", a encore hurlé, la voix cassée, cette petite femme brune débordant d'énergie. Le vote se déroulera jusqu'à 20H00 (19H00 GMT) et les premiers résultats devraient être publiés au plus tôt vers 22H00 (21H00 GMT).
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