Le pape François a condamné samedi pour sa première visite à Naples les organisations mafieuses "qui exploitent et corrompent les jeunes, les pauvres et les défavorisés" et la corruption qui "pue" dans une métropole marquée par la crise et la précarité.
Triomphalement et joyeusement accueilli par des centaines de milliers de Napolitains, le pape a parcouru la ville en papamobile découverte et s'est rendu dans deux lieux emblématiques de la criminalité: le quartier défavorisé de Scampia et la prison de Poggioreale où il a longuement rencontré les détenus, déjeunant avec 120 d'entre eux, dont une dizaine de transsexuels.
Lors de la messe solennelle sur la place du Plebiscito, autour de laquelle était affichées les images des grands saints de la cité, François s'est adressé aux "criminels" et leurs "complices" -sans prononcer les mots mafia et camorra-- en les exhortant à "se convertir".
- "l'amour et la justice" -
Il a demandé aux Napolitains de "réagir avec fermeté face aux organisations qui exploitent et corrompent les jeunes, les pauvres et les défavorisés, par le commerce cynique de la drogue et d'autres trafics. Que la corruption et la délinquance ne défigurent pas cette belle ville!", a-t-il dit, en appelant, en ce jour du printemps, la ville à s'ouvrir à "un nouveau printemps".
"Aux criminels et tous leurs complices, avec humilité, comme un frère, je répète: convertissez-vous à l'amour et à la justice. Il est toujours possible de retourner à une vie honnête. Ces sont des mères en larmes qui le demandent".
Semblant très à l'aise, François a dialogué même en napolitain: "Ca'a Maronna v'accumpagne!" ("Que la Madonne vous accompagne").
Le pape est resté ensuite une heure et demie à la prison de Poggioreale, exprimant sa solidarité: "Il m'arrive tant de lettres, certaines vraiment douloureuses, des prisons du monde entier". Mais, "même les barreaux d'une prison, a-t-il estimé, ne peuvent séparer de l'amour de Dieu. Même si nous avons fauté, le Seigneur ne se lasse pas de nous indiquer la voie du retour".
Plus tôt sur la place Jean Paul II (baptisée en souvenir d'une visite du pape polonais en 1990) du quartier de Scampia, le pape avait dénoncé crûment les illégalités: "comme un animal mort pue, la corruption pue, la société corrompue pue, et un chrétien qui fait entrer en lui la corruption pue".
François, assis sur un podium au milieu de centaines d'enfants, a fustigé "ceux qui, en prenant la voie du mal, volent un morceau d'espérance à eux-mêmes, à la société, à la bonne réputation de la ville, à son économie".
- 'Nous sommes tous des migrants' -
Le pape a soutenu fortement la supplique d'une Philippine, Corazon Dag-usen, qui a demandé que les immigrés qui affluent à Naples, venant d'Afrique et d'Asie, soient "reconnus", et plaidé pour un toit pour ceux, nombreux, qui sont sans domicile.
Les immigrés "sont des citoyens, pas des citoyens de seconde classe! Nous sommes tous des migrants, fils de Dieu, sur le chemin de la vie! C'est marqué dans notre chair", a martelé François.
Le chômage structurel, particulièrement des jeunes, a également été dénoncé. François a relevé que le chômage des moins de 25 ans atteint 40%. Les oeuvres caritatives et les aides sociales ne peuvent se substituer à la "dignité" du travailleur, car "ne pas avoir la possibilité d'apporter le pain à la maison, c'est se voir volée sa dignité".
Le pape a estimé que le travail au noir, très répandu dans l'économie parallèle napolitaine, était purement et simplement un "esclavage".
Dans ce tableau sombre, le pape a exalté la vitalité d'une culture napolitaine millénaire: "la vie à Naples n'a jamais été facile mais n'est jamais triste, sa grande ressource est la joie".
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