François Hollande se livre longuement dans une interview-confession au nouveau magazine Society à paraître vendredi, évoquant le Front national, "la mort qui habite la fonction présidentielle", Vladimir Poutine mais aussi ses espoirs de reprise économique.
A la veille des départementales, où le FN est crédité de près de 30% des voix, le chef de l'Etat le souligne: "l'extrême droite est une zone d'ombre au niveau international, qui nous ramène à une réalité interne difficile".
Reconnaissant qu'elle "a continué à progresser depuis 2012", François Hollande pointe "une radicalisation de la droite autour de l'identité nationale (ainsi qu')une déception à l'égard des alternances successives". D'où, selon lui, "ce vote par colère ou adhésion" et "une forme de banalisation, voulue par le FN lui-même, qui en a fait une stratégie".
Comme on lui demande si la gauche a abandonné la classe ouvrière au parti de Marine Le Pen, François Hollande relève qu'elle est effectivement "la catégorie qui a le plus souffert des mutations économiques et des suppressions d'emplois".
"Il est donc commode pour les populistes de laisser croire que c'est à cause des étrangers, de la mondialisation et de l'Europe que les difficultés sont venues et que la France pourrait se murer, se barricader ou se replier pour échapper aux grands vents de l'Histoire", analyse-t-il.
Sur l'exercice de sa fonction, il le confesse : "Voilà ce qui vous change, la mort habite la fonction présidentielle". "Le président est le chef de la famille française. Il doit partager les douleurs" mais aussi "maîtriser ses émotions au nom de la raison d'État", poursuit-il.
François Hollande se souvient du premier soldat français "mort en héros" au Mali, de l'angoisse des familles d'otages, de Hervé Gourdel décapité en Algérie ou de l'agent français tué par ses ravisseurs en Somalie. "Cette nuit-là, je n'ai pas dormi, je suis resté en relation constante avec nos services", confie-t-il.
- Un président qui 'peut bouillir' -
Mais le chef de l'Etat revient aussi longuement sur l'attentat contre Charlie Hebdo et la "voix déchirée par les sanglots" du médecin urgentiste Patrick Pelloux lui disant: "Ils sont morts, ils sont tous morts, viens vite."
Au chapitre économique, François Hollande en est persuadé: "Une reprise s'annonce" et "les conditions économiques s'améliorent () "alors, si j'arrive à faire passer l'idée que ça va mieux, ça ira encore mieux."
Les moqueries ou les railleries à son égard ? "Je ne suis ni insensible aux bassesses, ni indifférent aux outrances mais je ne montre rien car le chef de l'État doit mettre ses sentiments personnels de côté", répond-il.
Pour autant, assure-t-il, "je peux avoir une colère intérieure, je peux bouillir, il m'arrive d'être ulcéré par l'injustice, la trahison, la vilenie ou encore récemment par les attaques contre Christiane Taubira, dont on voit bien les relents qu'elles peuvent porter".
Comme dans un aveu, il ajoute: "en campagne, le candidat peut tout. Après, il s'adapte à la réalité. Et quand il ne peut pas, il est sanctionné".
Notant aussi que la société "est devenue de plus en plus impatiente", il estime que "la démocratie doit changer de rythme", sinon, "c'est elle qui sera changée".
François Hollande tresse par ailleurs des lauriers à la ministre de l?Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem, qui "n'avait pas le profil habituel du poste" et "apporte plus d'écoute, de compréhension, d'imagination, d'invention que bien d'autres avant elle".
"Le fait même qu'elle ait ce visage, qu'elle porte ce nom, c'est aussi un message: +Voilà, l'école peut être le lieu de la réussite pour tous+".
Quant au ministre de l?Économie Emmanuel Macron, "suspect" aux yeux de certains pour avoir "passé quatre ans dans une banque" avant de le rejoindre à l'Élysée, "il aurait pu aller fonder une start-up ou donner des conférences" et "a préféré servir son pays et donner un coup de jeune à certaines réformes".
Le président russe Vladimir Poutine ? "Il dit les choses, pas toujours dans un langage convenu", glisse François Hollande qui a donc "choisi d'être direct face à un chef d'État qui parle de manière directe".
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