Les salariés adeptes de la cigarette électronique peuvent actuellement vapoter au travail en toute impunité, sauf interdiction expresse dans le règlement intérieur de l'entreprise: une situation juridique restée longtemps floue et méconnue, qui devrait changer sous peu.
Le gouvernement a en effet annoncé en septembre dans le cadre du plan anti-tabac qu'il prévoyait d'interdire l'usage de l'e-cigarette dans les espaces clos collectifs de travail, via un amendement au projet de loi santé attendu en avril au Parlement.
Selon le ministère de la Santé, cet amendement "sera présenté dans le cadre de l'examen du projet de loi en séance publique et s'appuiera sur l'avis rendu par le Conseil d'Etat le 17 octobre 2013". Celui-ci préconise d'interdire le vapotage dans certains espaces collectifs, notamment au travail.
Jusqu'à récemment, alors que la cigarette électronique connaît un succès spectaculaire dans l'Hexagone, la législation n'était pas très claire. "Il y avait un flou", explique à l'AFP Me Eric Rocheblave, avocat en droit social.
Après des décisions judiciaires contradictoires, la Cour de cassation n'a tranché que très récemment.
Un arrêt du 26 novembre 2014 est ainsi venu dire clairement que l'interdiction de fumer dans les lieux publics (et par extension au travail) ne s?applique pas à la cigarette électronique, car celle-ci "ne saurait être assimilée à une cigarette traditionnelle".
Résultat, dit le juriste Sylvain Niel, "il faut soit une disposition législative", "soit, comme l'ont fait la RATP, Air France, etc. prendre des mesures réglementaires".
Les grands groupes interrogés par l'AFP, comme PSA, La Poste, Renault, ou le cigarettier Seita ont déjà pris des mesures. Mais "pour la paix sociale, une loi facilitera les choses", estime Me Rocheblave, car ce ne sera plus à l'employeur de prendre la responsabilité.
Toutefois, note M. Niel, il n'y a "pas beaucoup d'entreprises où la problématique se pose" car "la cigarette électronique est souvent assimilée naturellement par les salariés comme étant une cigarette classique", donc avec les mêmes usages.
- 'La vape : pas du tabac' -
Le détail de la future législation reste toutefois inconnu.
"Nous sommes très prudents en attendant les annonces", explique Maria Cardenas, directrice de l'association Droit des non fumeurs (DNF). "Nous demandons que la législation soit très claire" pour interdire le vapotage qui équivaut à fumer car "ça rappelle l'acte de fumer, ça dégage de la fumée, etc".
Pour Bertrand Dautzenberg, pneumologue à la Pitié-Salpétrière et auteur d'un rapport en mai 2013 sur la e-cigarette, "la pire des choses, ce serait que la règle ne soit pas extrêmement claire".
"Le plus simple, le plus compréhensible, c'est d'interdire partout où on interdit de fumer", dit-il à l'AFP.
De son côté, la fédération des professionnels de la cigarette électronique (Fivape) affirme à "100% que la vape n'est pas du tabac et donc qu'il ne faut pas de réglementation calquée sur celle du tabac".
Rémi Parola, porte-parole de la fédération, met en avant la santé publique: le tabac étant la première cause de décès évitable en France (73.000 morts par an), il ne faut pas "renvoyer les vapoteurs avec les fumeurs". Il n'y a "pas de preuve de vapotage passif", dit-il, même s'il y a "une question de courtoisie", l'odeur ou le geste pouvant déranger.
L'Institut national de recherche et de sécurité (INRS) note de son côté qu'"il ne peut être conclu, à l'heure actuelle, à l'absence de risques pour l'entourage". Or, le code du travail prescrit à l'employeur une obligation de sécurité vis-à-vis des salariés.
Pour Me Eric Rocheblave, avec ce "flou artistique", le message est clair: "dans le doute, employeurs, prenez une interdiction de vapoter sur le lieu de travail".
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