L'Islande a enterré jeudi sa candidature à l'Union européenne, peut-être pour très longtemps, le pays étant dominé par l'euroscepticisme et refusant de soumettre sa pêche aux quotas de Bruxelles.
La décision a été formellement annoncée jeudi à la Lettonie, pays qui assure la présidence semestrielle de l'UE, qui l'a transmise à la Commission européenne.
Elle est l'application du programme de la coalition de centre droit arrivée au pouvoir en 2013, qui promettait de mettre fin au processus d'adhésion.
"Les intérêts de l'Islande sont mieux servis en dehors de l'Union européenne", a justifié le ministère des Affaires étrangères sur son site internet.
Le Premier ministre Sigmundur David Gunlaugsson a rappelé qu'"aucun des partis" au pouvoir n'avait envie de poursuivre le travail nécessaire avant de rejoindre les 28 Etats membres de l'UE.
Partisan de l'adhésion, le chef de file de l'opposition sociale-démocrate, Arni Pall Arnasson, a déploré un passage en force de l'exécutif, qui n'a jamais réussi à obtenir une majorité au Parlement sur le sujet.
Il avait fallu des circonstances très particulières pour que Reykjavik dépose sa candidature en 2009: le premier gouvernement de gauche de l'histoire du pays, une grave crise financière qui avait ébranlé la confiance des citoyens dans leurs institutions nationales et la chute de la valeur de la couronne, qui avait suscité l'envie d'adopter l'euro.
Les sociaux-démocrates islandais n'ont jamais réussi à expliquer à l'opinion comment ils allaient combler le fossé entre Bruxelles et Reykjavik sur les quotas de pêche. Ce sujet épineux n'aura même pas été abordé lors des négociations entre juin 2011 et janvier 2013.
Quand le Parti du progrès (centriste et agrarien) et le Parti de l'indépendance (conservateur, proche des milieux d'affaires) ont repris le pouvoir, ils ont tâché de fermer la parenthèse.
Les premiers, farouchement anti-UE, et qui détiennent le poste de Premier ministre, ont fait plier les seconds, plus divisés, qui souhaitaient consulter les électeurs.
- Les avantages sans les inconvénients -
"Le gouvernement n'a pas l'intention d'organiser un referendum", a précisé le ministère des Affaires étrangères. Et mieux, "si le processus doit être repris à l'avenir, le gouvernement actuel considère important de ne pas progresser sans en référer préalablement à la Nation".
Même si une majorité des électeurs aurait souhaité un referendum, il semble difficile d'imaginer ce qui pourrait les amener à voter "oui" un jour, alors que le pays bénéficie déjà de nombreux avantages grâce à ses liens avec l'UE, sans souffrir des inconvénients.
L'Islande est ainsi membre de l'Association européenne de libre échange (AELE) et applique la convention de Schengen qui permet la libre circulation des personnes.
Cela permet au pays d'exporter ses produits de la mer vers le continent sans barrière tarifaire, alors même qu'il est engagé dans une "guerre du maquereau" avec l'UE.
Depuis que l'Islande a relevé son quota de pêche en 2010, au motif que le réchauffement climatique aurait fait migrer l'espèce vers le nord, le conflit n'a pas pu être résolu malgré une multitude de réunions.
Laisser Bruxelles décider du quota de pêche islandais paraît impensable sur l'île.
L'espace Schengen stimule une autre industrie importante pour le pays, le tourisme, crucial pour les entrées de devises.
Plus de six ans après l'effondrement d'un secteur financier hypertrophié qui avait plongé l'île dans la récession, la principale préoccupation d'une majorité d'Islandais n'est pas l'UE, mais les emprunts contractés durant les années de "boom" économique qu'ils ont du mal à rembourser.
"Le PIB par tête reste plus bas qu'en 2008, et même si nous ne manquons pas d'emplois nous manquons de boulots qui paient bien, surtout pour les jeunes diplômés", disait à l'AFP Asgeir Jonsson, professeur d'économie à l'Université d'Islande.
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