Plus d'autonomie, avec 20% de l'emploi du temps laissé à la discrétion de chaque établissement dès la rentrée 2016, et un enseignement plus précoce de la deuxième langue: le gouvernement a dévoilé mercredi sa réforme du collège, un chantier délicat pour renforcer les apprentissages fondamentaux.
La première grande réforme lancée par Najat Vallaud-Belkacem, présentée ce mercredi en Conseil des ministres, doit ensuite être discutée avec la communauté éducative pendant un mois, pour une entrée en vigueur à quelques mois de l'élection présidentielle de 2017.
Chaque collège définira, suivant les besoins de ses élèves, 20% de son emploi du temps, réservé à du travail en petits groupes, de l'accompagnement personnalisé pour tous les élèves (trois heures en sixième, au moins une heure pour les autres classes), et à partir de la cinquième de nouveaux Enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI). La deuxième langue vivante (LV2) sera étudiée un an plus tôt, dès la cinquième.
Le projet est financé sur les 60.000 créations de postes promises par François Hollande pendant le quinquennat, avec des "heures-professeurs" totalisant 4.000 postes, à répartir entre 7.000 collèges scolarisant 3,2 millions d'élèves.
"Aucune discipline () ne perdra d'heures, chacune de ces disciplines sera mise à contribution pour travailler autrement", a dit la ministre de l'Education nationale sur Europe 1. Interrogée sur ce qui était négociable, elle a assuré que "les grands axes de la réforme" constituaient un cadre "rigide". Les grilles horaires restent à définir.
"On a assez peu de précisions sur les conditions de mise en oeuvre", a expliqué à l'AFP Frédérique Rolet, secrétaire générale du Snes-FSU, premier syndicat du secondaire, très attaché à l'intégrité des disciplines. Elle demande que les EPI soient bien inscrits dans les programmes scolaires, en cours de réécriture.
"L'interdisciplinarité, c'est un outil, pas le remède miracle qui va remotiver tous les élèves en difficulté", prévient Mme Rolet.
Alors qu'on demandera aux enseignants de travailler davantage ensemble, rien n'est dit sur "un temps de concertation", relève-t-elle. Le ministère considère que ce temps est inclus dans les obligations réglementaires de service des enseignants, revues dans un récent décret.
- 'Occasion unique' -
Le syndicat réformiste SE-Unsa soutient lui dans un communiqué "les grands principes d'une réforme pédagogique qui ouvre des espaces pour travailler +autrement+", avec une "modeste" amélioration des conditions de travail grâce aux 4.000 postes.
Le collège, où beaucoup d'élèves s'ennuient, est "un des points noirs" de la scolarité et "ne garantit pas l'acquisition des apprentissages de base", a déclaré Najat Vallaud-Belkacem en présentant sa réforme à la presse. "En dix ans, les élèves ont régressé dans leurs apprentissages fondamentaux" et les inégalités se sont creusées.
Si d'autres réformes du collège ont déjà été lancées, "nous avons l'occasion unique" de travailler cette fois en même temps sur le contenu du socle commun (qui définit ce que tout élève doit avoir acquis à 16 ans), "de réviser les programmes pour qu'ils soient en cohérence" avec ce socle et "de repenser les organisations", a plaidé la ministre.
Les mesures envisagées ont été "expérimentées avec succès sur le terrain".
L'objectif des Enseignements pratiques interdisciplinaires est de "permettre aux élèves de sortir de l'abstraction d'un certain nombre de disciplines", "faire se rencontrer les savoirs", réaliser "des expériences pratiques", travailler collectivement et par projet, "sortir de la passivité".
Des élèves de quatrième pourraient ainsi réaliser un magazine sur la machine à vapeur, en mobilisant ce qu'ils ont appris en histoire sur la révolution industrielle au XIXe siècle, mais aussi en physique sur la pression d'un gaz. Avec les mathématiques, ils pourraient calculer le temps gagné pour se rendre de Paris à Lyon ou Marseille en train plutôt qu'à cheval.
Le brevet des collèges évoluera, selon des modalités arrêtées le 10 avril.
Depuis la création du "collège unique" en 1975, la France a réussi la "massification", autrement dit scolariser toute une classe d'âge dans une même structure, mais pas la "démocratisation", c'est-à-dire faire réussir tous les élèves malgré leur hétérogénéité.
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