Plus d'autonomie, avec 20% de l'emploi du temps laissé à la discrétion de chaque établissement dès la rentrée 2016, et un enseignement plus précoce de la deuxième langue: le gouvernement dévoile mercredi sa réforme du collège, un chantier délicat pour renforcer les apprentissages fondamentaux.
Le projet, présenté par Najat Vallaud-Belkacem en Conseil des ministres, doit ensuite être discuté avec la communauté éducative pendant un mois, pour une entrée en vigueur à quelques mois de l'élection présidentielle de 2017.
Ce chantier, qui a pris plus d'un an de retard, est politiquement compliqué.
La ministre de l'Education nationale met en avant des savoirs mis en contexte, de la "souplesse" et "un acte de confiance dans les équipes enseignantes". Mais il lui reste à convaincre des syndicats attachés à l'intégrité des disciplines comme le SNES-FSU ou le Snalc, alors que les réformistes comme le SE-Unsa et le Sgen-CFDT demandent eux plus d'interdisciplinarité.
Le projet est financé sur les 60.000 créations de postes promises par François Hollande pendant le quinquennat, avec des "heures-professeurs" totalisant l'équivalent de 4.000 postes, à répartir entre 7.000 collèges qui scolarisent 3,2 millions d'élèves.
Le collège, "un des points noirs" de la scolarité, "ne garantit pas l'acquisition des apprentissages de base", a déclaré à des journalistes Najat Vallaud-Belkacem, qui détaille aussi sa réforme dans un entretien accordé à la presse quotidienne régionale. "En dix ans, les élèves ont régressé dans leurs apprentissages fondamentaux, notamment en maths, en français, en histoire."
Elle a pointé l'ennui ressenti par beaucoup de collégiens, source de décrochage, le sentiment d'enseignants "d'être bridés dans leurs initiatives" et des parents "démunis".
Dans un cadre "fait pour les meilleurs et qui oublie les moins bons", les inégalités se sont creusées: 95% des enfants de cadres décrochent le brevet, contre 75% des enfants d'ouvriers.
- 'Occasion unique' -
Le collège est aussi "passé à côté" d'adaptations "indispensables" comme le travail collectif ou le numérique, a-t-elle estimé.
Si beaucoup de réformes du collège ont déjà été lancées, "nous avons l'occasion unique de travailler sur le contenu du socle" commun (qui définit ce que tout élève doit avoir acquis à 16 ans), "de réviser les programmes pour qu'ils soient en cohérence" avec ce socle et "en même temps de repenser les organisations", a-t-elle estimé. Les mesures envisagées dans la réforme du collège ont été "expérimentées avec succès sur le terrain", a-t-elle souligné.
Concrètement, l'étude de la deuxième langue vivante (LV2) sera avancée d'un an, dès la cinquième.
En outre, tous les collégiens auront désormais un accompagnement personnalisé: trois heures par semaine en sixième, une heure minimum dans les autres classes.
A partir de la cinquième seront introduits des enseignements pratiques interdisciplinaires, pour "permettre aux élèves de sortir de l'abstraction d'un certain nombre de disciplines", "faire se rencontrer les savoirs", réaliser "des expériences pratiques", travailler collectivement et par projet, "sortir de la passivité".
Des élèves de quatrième pourraient ainsi réaliser un magazine sur la machine à vapeur, en mobilisant ce qu'ils ont appris en histoire sur la révolution industrielle au XIXe siècle, mais aussi en physique sur la pression d'un gaz. Avec les mathématiques, ils pourraient calculer le temps gagné pour se rendre de Paris à Lyon ou Marseille en train plutôt qu'à cheval.
En tout, ces trois temps - enseignements pratiques interdisciplinaires, accompagnement personnalisé et travail en petits groupes - "constitueront un bloc de 20% dans la scolarité au collège, qui sera défini par le conseil pédagogique", composé du chef d'établissement et des enseignants, suivant les besoins des élèves.
Les "enseignants seront amenés à travailler ensemble, cela implique une meilleure coordination" et permettra une "meilleure détection précoce des difficultés des élèves" selon la ministre. En France, l'exercice du métier d'enseignant est considéré comme particulièrement solitaire.
Le brevet des collèges évoluera, selon des modalités qui seront arrêtées le 10 avril.
Depuis la création du "collège unique" en 1975, la France a réussi la "massification", autrement dit scolariser toute une classe d'âge dans une même structure, mais pas la "démocratisation", c'est-à-dire faire réussir tous les élèves malgré leur hétérogénéité.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.