L'attentat dans un bar-restaurant de Bamako, qui a coûté la vie à trois Maliens et à deux Européens et a été revendiqué par le groupe jihadiste Al-Mourabitoune, est le premier de ce type perpétré dans la capitale malienne, relèvent des experts de la région.
QUESTION: L'attaque de Bamako est-elle inédite ?
REPONSE: "C'est le premier attentat de ce type à Bamako", souligne Pierre Boilley, directeur de l'Institut des mondes africains (IMAF). Pour être inédite, l'attaque n'en était pas moins crainte depuis 2012, année où le nord du Mali était tombé sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda.
Ils en ont été en grande partie chassés par l'opération "Serval", lancée par la France en janvier 2013, mais les observateurs craignaient un attentat d'ampleur dans le sud du pays et notamment à Bamako, où ont afflué des dizaines de milliers de déplacés.
C'est la première fois qu'une capitale sahélienne est frappée depuis l'enlèvement en 2011 de deux Français dans un restaurant français du centre de Niamey, la capitale du Niger.
QUESTION: La France était-elle directement visée et par qui?
REPONSE: Les assaillants s'en sont pris au restaurant La Terrasse, un lieu très fréquenté par les expatriés. "On sait que si on va dans cette rue, c'est pour faire un carton sur les Occidentaux, sachant que les Occidentaux à Bamako, c'est quand même beaucoup de Français", relève Johanna Siméant, auteur de "Contester au Mali", publié par les éditions Karthala.
Le groupe Al-Mourabitoune de l'Algérien Mokhtar Belmokhtar a d'ailleurs exprimé clairement dans sa revendication ses motivations anti-occidentales et anti-françaises.
"Nous revendiquons la dernière opération de Bamako menée par les vaillants combattants d'Al-Mourabitoune pour venger notre prophète de l'Occident mécréant qui l'a insulté et moqué, et notre frère Ahmed Tilemsi", déclare un porte-parole dans un enregistrement audio diffusé par l'agence privée mauritanienne Al-Akhbar. Tilemsi était un chef du groupe tué par l'armée française en décembre dernier.
Avant la diffusion de cette revendication, Antoine Glaser, auteur d'"Africafrance", publié par les éditions Fayard, évoquait la possibilité d'"une sorte de pied-de-nez" des jihadistes pourchassés dans le nord du Mali par l'opération "Barkhane", qui a succédé en août 2014 à l'opération "Serval". Selon lui, les jihadistes pourraient avoir voulu "montrer qu'il y a une fragilité sécuritaire sur l'ensemble du territoire" malien.
QUESTION: Que peut faire la communauté internationale, et notamment la France ?
REPONSE: Après avoir condamné l'attentat, le président François Hollande s'est entretenu avec son homologue malien Ibrahim Boubacar Keïta, pour "lui offrir l'aide de la France". Ils sont convenus de "mesures communes pour renforcer la sécurité au Mali", a annoncé Paris sans plus de précision.
Mais pour Antoine Glaser, "on ne voit pas tellement comment la France peut faire plus que ce qu'elle fait déjà dans toute cette zone sahélo-saharienne" avec "Barkhane", comprenant 3.000 soldats français mobilisés dans cinq pays du Sahel.
"La France arrive au bout de ce qu'elle peut faire sans l'aide de ses partenaires européens, qui restent extrêmement silencieux", regrette-t-il.
Epinglant lui aussi la "timidité" des pays européens, Pierre Boilley juge toutefois que la prise de conscience progresse à Bruxelles.
La chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, a paru samedi refléter cette évolution. L'attaque de Bamako, a-t-elle dit, "nous rappelle que nous devons rester concentrés sur le processus au Mali et sur la lutte contre le terrorisme dans la région. Et nous sommes prêts à faire davantage".
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