Claude Guéant a été mis en examen samedi, les juges s'interrogeant sur la vente de tableaux flamands à un avocat malaisien, alléguée pour expliquer un virement de 500.000 euros reçus sur son compte depuis la Malaisie.
Ces investigations sont menées dans le cadre d'une enquête initialement ouverte après des accusations de financement par la Libye de Mouammar Kadhafi de la campagne présidentielle en 2007 de Nicolas Sarkozy, dont Claude Guéant était alors l'homme de confiance.
Mais aux yeux de Me Philippe Bouchez el-Ghozi, l'avocat de Claude Guéant, ce "dossier présenté comme faramineux", "se dégonfle tout à fait" malgré la mise en examen de son client pour blanchiment de fraude fiscale en bande organisée et faux et usage de faux, selon une source judiciaire.
Pendant ses 30 heures de garde à vue, "on lui a posé près de 300 questions qui portaient pour l'essentiel sur ce soi-disant financement libyen" de la campagne présidentielle, a noté l'avocat. Mais en lieu et place de faits de corruption liés à ces soupçons de financement, "on a un dossier qui se réduit simplement à justifier l'acquisition de deux tableaux il y a 22 ans et de leur réalité et, éventuellement, de leur déclaration fiscale", selon l'avocat qui a ajouté que son client niait tout délit.
L'ancien premier flic de France est soumis à un contrôle judiciaire lui interdisant de se rendre en Malaisie et d'entrer en contact avec certaines personnes, dont un homme d'affaires saoudien, Khalid Ali Bugshan, lui aussi mis en examen samedi, pour blanchiment de fraude fiscale en bande organisée, selon la source judiciaire.
Interdit de quitter le territoire français et soumis à une caution d'un million d'euros, M. Bugshan est soupçonné d'avoir joué un rôle dans les flux financiers qui ont abouti au versement de 500.000 euros sur le compte de Claude Guéant.
Celui-ci avait justifié ce virement par la vente en 2008 à un avocat malaisien de deux marines d'un peintre flamand du XVIIe, Andries van Eertvelt. Mais des experts avaient contesté la valorisation de ces ?uvres.
- Sawari II -
Selon une source proche de l'enquête, M. Bugshan est soupçonné d'avoir versé les 500.000 euros sur le compte d'une société malaisienne qui l'aurait ensuite reversée sur le compte de Claude Guéant.
Les juges financiers parisiens ont lancé une commission rogatoire internationale en Malaisie, mais n'ont pas eu de réponse. Et l'avocat qui, à en croire Claude Guéant, aurait acquis les tableaux, semble aussi insaisissable que les oeuvres.
Le nom de l'homme d'affaires saoudien n'est pas inconnu de la justice française. Il était notamment apparu dans une autre enquête politico-financière, celle dite de Karachi sur le financement de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur via des rétrocommissions présumées sur un contrat d'armement avec l'Arabie Saoudite, Sawari II.
L'enquête qui vaut sa mise en examen à Claude Guéant, est née d'accusations de dignitaires kadhafistes qui ont affirmé à partir de 2011, sans apporter de preuve, que Nicolas Sarkozy avait bénéficié d'un financement de la Libye de Kadhafi pour sa campagne 2007.
Ouverte en avril 2013 notamment pour "corruption active et passive" et "trafic d'influence", elle a été confiée aux juges Serge Tournaire et René Grouman.
L'entourage de M. Guéant a relevé le caractère vexatoire des conditions de la garde à vue de Claude Guéant avec l'envoi à l'aube de policiers au domicile de l'ancien ministre de l'Intérieur vendredi. Il a aussi laissé entendre que cette enquête était l'objet d'une instrumentalisation politique avant les cantonales.
C'est sa troisième garde à vue après celles ordonnées dans les affaires de l'arbitrage Tapie et des primes en liquide qu'il a perçues quand il était directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy, au ministère de l'Intérieur.
Dans ce dossier, le parquet national financier doit prochainement décider de classer sans suite, de désigner des juges ou de faire citer Claude Guéant en correctionnelle. Pour ce qui est de l'affaire de l'arbitrage, il ne fait l'objet d'aucune poursuite.
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