Gérard Lhéritier, patron et médiatique fondateur d'Aristophil, société qui proposait aux épargnants de placer leur argent dans des lettres historiques ou des manuscrits, a été mis en examen jeudi, soupçonné d'escroquerie.
Signe de l'énormité des sommes en jeu dans ce que les enquêteurs pensent être un système pyramidal de cavalerie de type Ponzi, il s'est vu imposer un cautionnement de 2 millions d'euros dans le cadre de son contrôle judiciaire.
Sa fille, responsable de la gestion des collections, et l'expert comptable de la société ont également été mis en examen. Le juriste qui rédigeait les contrats avec les épargnants et un libraire-expert comparaissaient également devant une magistrate dans la nuit de jeudi à vendredi.
Aristophil proposait de placer son épargne dans des manuscrits avec des taux annoncés de 8 à 9%, un niveau surprenant pour les enquêteurs, qui se demandent si l'apport des nouveaux investisseurs ne servait pas à payer ceux qui souhaitent récupérer leur mise agrémentée de taux élevés.
Les sommes en jeu, mises au jour par l'enquête préliminaire confiée par le parquet à la PJ parisienne, donnent le tournis.
Les policiers ont comptabilisé à ce stade 18.000 souscripteurs ayant conclu des contrats pour un montant de 850 millions d'euros, selon la source judiciaire.
Outre les contrats passés, les enquêteurs de la PJ ont estimé que d'autres étaient en cours de préparation, pour un montant de 600 à 700 millions d'euros.
Dans la perspective d'un possible préjudice, la justice avait également ordonné la saisie d'avoirs bancaires pour plus de 105 millions d'euros et de biens immobiliers pour 13 millions d'euros. Des lettres et des manuscrits de la société ont également été saisis.
Après le lancement de l'enquête préliminaire du parquet, de nombreux épargnants se sont manifestés auprès de la justice.
Ils avaient acheté des parts dans des écrits figurant dans le catalogue d'Aristophil, parfois très prestigieux, comme le testament politique de Louis XVI, les écrits du général de Gaulle, des manuscrits du marquis de Sade ou d'André Breton
- "Des précurseurs" -
Avec ce dispositif, la société, dont l'objet principal est d'acheter "des lettres et des manuscrits pour les revendre avec bénéfice", proposait des morceaux d'histoire et du rêve érudit mais aussi des placements financiers, avec des écrits originaux.
Ils pouvaient être acquis par parts, en indivision. L'acquéreur achetait donc dans ce cas un bien incorporel, un titre financier, et non un manuscrit en tant que tel.
Aristophil revendiquait à l'automne avoir en dépôt ou en propriété environ 135.000 documents et manuscrits, les plus belles pièces dans son musée du VIe arrondissement de Paris.
Cet investissement atypique a rencontré, selon Aristophil, "un succès sans cesse grandissant", et dérouté tout autant le monde confiné de la bibliophilie que les spécialistes de l'épargne. Mais également la direction des fraudes (DGCCRF), intriguée par cette société depuis fin 2012.
Fondée en 2003, Aristophil employait 70 personnes et réalisait en 2013 un chiffre d'affaires de 166 millions d'euros pour un bénéfice de 3,5 millions, selon des chiffres communiqués à l'AFP.
A l'automne, son avocat avait estimé qu'Aristophil et Gérard Lhéritier, un passionné d'histoire, payaient d'être des "précurseurs qui se sont intéressés à un marché qui était jusqu'alors l'apanage confiné des libraires du VIe arrondissement".
Tout comme l'expert-comptable, Gérard Lhéritier a été mis en examen pour escroquerie en bande organisée et blanchiment, présentation de comptes infidèles, pratiques commerciales trompeuses, abus de biens sociaux et abus de confiance. Sollicité par l'AFP, son avocat n'a pas donné suite. La fille du bibliophile est poursuivie pour escroquerie en bande organisée.
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