"C'était lui": au premier jour du procès des attentats de Boston, la défense a reconnu mercredi la responsabilité de l'accusé Djokhar Tsarnaev, mais dans un effort pour lui éviter la peine de mort, a insisté sur l'influence majeure qu'était pour lui son frère aîné.
Dans une salle du tribunal fédéral de Boston pleine à craquer, en présence de plusieurs victimes ou membres de leur famille, l'avocate de Djokhar Tsarnaev, 21 ans, n'a pris que 20 minutes pour présenter sa ligne de défense dans sa déclaration d'ouverture.
"C'était lui. Nous n'esquivons pas, n'esquiverons pas, ou n'essayerons pas d'esquiver sa responsabilité pour ses actions", a déclaré Judy Clarke. Mais elle a demandé aux jurés, qui devront décider entre réclusion à perpétuité et peine de mort s'ils jugent Tsarnaev coupable, de garder l'esprit ouvert, pour la deuxième partie du procès qui sera consacré à la sentence.
Mme Clarke, une pénaliste qui a évité à plusieurs de ses clients la peine capitale, a déclaré qu'elle serait d'accord avec les procureurs sur de nombreuses pièces à conviction. Mais elle a affirmé que Tsarnaev avait été radicalisé par son frère aîné Tamerlan, 26 ans, tué quelques jours après les attentats lors d'une confrontation avec la police.
"C'était Tamerlan Tsarnaev qui s'était auto-radicalisé. C'était Djokhar qui suivait", a-t-elle dit.
Avant Mme Clarke, le procureur William Weinreb avait durant 50 minutes ravivé les souvenirs douloureux du carnage qui avait fait 3 morts et 264 blessés le 15 avril 2013. Deux bombes artisanales déposées par les frères Tsarnaev près de la ligne d'arrivée du marathon avaient explosé à quelques secondes d'intervalle.
Djokhar Tsarnaev, un jeune musulman d'origine tchétchène, arrivé en 2002 avec ses parents dans la région de Boston (nord-est des Etats-Unis) et devenu citoyen américain en 2012, a plaidé non coupable des 30 chefs d'accusation retenus contre lui après ces attentats, les plus graves depuis le 11-Septembre aux Etats-Unis.
En veste de costume et chemise à col ouvert, regardant droit devant lui, le jeune homme à la tignasse rebelle a suivi sans réaction particulière la première journée d'audience.
Le procureur a aussi fait revivre les jours ayant suivi les attentats, jusqu'à l'arrestation de l'accusé, caché dans un bateau en banlieue de Boston le 19 avril au soir, grièvement blessé.
Le procureur a raconté les milliers de spectateurs massés sur le parcours du marathon, dont de nombreuses familles, car il s'agissait d'un jour férié.
"Le but était de tuer autant de personnes que possible", a-t-il asséné. "Certains ont saigné à mort sur le trottoir pendant que l'accusé s'enfuyait", a-t-il ajouté, affirmant que cela avait été le cas du petit Martin Richard, 8 ans.
L'enfant était si petit, a-t-il dit, que la bombe l'a éviscéré, exposant ses côtes et ses organes, et brûlant sa peau.
Vingt minutes plus tard, a ajouté le procureur, Djokhar Tsarnaev achetait du lait dans un supermarché, "comme s'il n'en avait strictement rien à faire", avant de retourner sur son campus.
- Radicalisation progressive -
Le jeune étudiant, a-t-il affirmé, s'était progressivement radicalisé à partir de 2011. Si de l'extérieur il menait une vie normale sur son campus de l'Université du Massachusetts, jouant à des jeux vidéo avec ses amis, il "cachait" un autre aspect de lui, lisant de la propagande "terroriste", écoutant des chansons "terroristes" chez lui et jusque dans sa voiture. Et c'est cette propagande, a ajouté le procureur, qui l'a convaincu qu'il fallait tuer des Américains pour les punir de tuer des musulmans ailleurs dans le monde. Il voulait gagner son "paradis", a affirmé M. Weinreb, selon lequel les enquêteurs ont retrouvé dans son ordinateur de nombreux exemplaires du magazine d'Al-Qaïda, "Inspire", avec lequel les frères Tsarnaev auraient appris à fabriquer leurs bombes.
"Le gouvernement américain tue nos civils innocents. () Arrêtez de tuer nos innocents et nous arrêterons", avait écrit Djokhar Tsarnaev à l'intérieur du bateau où il a été retrouvé, a ajouté l'accusation.
Le procureur a aussi rappelé la fuite des deux frères après qu'ils eurent été identifiés, et comment ils avaient tué à bout portant un policier, avant de braquer le propriétaire d'un 4X4 ensuite contraint de retirer pour eux une forte somme à un distributeur de billets.
Après les déclarations d'ouverture, plusieurs victimes, certaines amputées, ont raconté leurs souvenirs de la journée, le bruit, les cris, la peur de mourir et la souffrance.
Le procès devrait durer jusqu'en juin.
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