Onze ans après la mort des cinq marins du Bugaled Breizh, une audience "de la dernière chance" s'est ouverte mardi matin à Rennes pour contester le non-lieu prononcé l'an dernier sur le naufrage en Manche du chalutier breton en 2004.
La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes examine l'appel des familles des victimes contre l'ordonnance de non-lieu prononcée en mai 2014 par les juges d'instruction. Les proches des pêcheurs décédés continuent de croire que le bateau a été envoyé par le fond par un sous-marin qui se serait pris dans ses filets.
"On est pas loin d'avoir quelqu'un qui finira par parler", a déclaré à la presse juste avant le début de l'audience Dominique Launay, président de l'association SOS Bugaled Breizh. Si jamais le non-lieu est confirmé, "on aura encore trois ans pour apporter des éléments nouveaux", a-t-il ajouté.
"On espère un sursaut, de la dignité, qu'il va vraiment se passer quelque chose aujourd'hui. On ne peut pas partir sans avoir la vérité", a-t-il plaidé.
Le Bugaled Breizh, immatriculé au Guilvinec (Finistère), avait sombré au sud-ouest de l'Angleterre le 15 janvier 2004.
Pour les proches des victimes, confortés par une première instruction en 2008 selon laquelle l'hypothèse du sous-marin était "la plus sérieuse", le navire a été accidentellement happé par un sous-marin, alors que se déroulaient dans la zone où il pêchait des man?uvres de l'Otan avec des sous-marins de diverses nationalités, y compris français.
- 'Ça passe ou ça casse' -
Pour Christian Bergot, avocat des familles, cette audience est celle de la dernière chance: "Ça passe ou ça casse. Si le non-lieu est confirmé, le dossier est mort."
"Je vais demander à la cour de poursuivre les investigations" dans la lignée des éléments apportés par l'expert Dominique Salles, a-t-il expliqué. L'expert, ancien sous-marinier, avait remis à la justice, avant le non-lieu, une "note très circonstanciée" concernant la présence sur zone d'un sous-marin américain, mais cette piste n'a pas été explorée.
La cour d'appel de Rennes a rejeté vendredi la demande des familles qui entendaient récuser l'un des magistrats. L'avocat de l'armateur du Bugaled, Michel Kermarrec, a demandé quant à lui le dépaysement de l'appel, invoquant la "partialité de la cour d'appel de Rennes".
Au-delà d'une éventuelle confirmation du non-lieu, la cour a d'autres options, résume Me Bergot. Elle peut ordonner des investigations complémentaires et soit décider de traiter elle-même le dossier, soit charger un nouveau juge d'instruction de cette mission.
Les familles des victimes voudraient au minimum que l?État reconnaisse sa responsabilité dans ce drame.
Close le 3 juillet 2013, l'instruction du dossier, qui s'est à plusieurs reprises heurtée au secret défense, n'a pas validé la thèse du sous-marin, qu'il soit américain ou britannique.
Après avoir écrit au président de la République pour lui demander une audience, l'armateur du chalutier, Michel Douce, a reçu ces dernières semaines un courrier dans lequel le chef de l'Etat exprime sa compassion mais renvoie vers la garde des Sceaux, Christiane Taubira.
Quant au ministre de la Défense, le Breton Jean-Yves Le Drian, il a répondu à l'armateur que "la justice n'a pas établi de lien entre ces man?uvres et le naufrage et qu'aucun engagement de l'Etat dans cet accident n'a pu être démontré".
La décision de la chambre de l'instruction pourrait être mise en délibéré.
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