Le gouvernement grec a peu de temps pour savourer le sauvetage de sa place dans la zone euro: il est au travail samedi pour présenter, sous 48 heures, un catalogue de réformes destinées à entériner le compromis arraché au forceps et à préserver quelques promesse électorales.
Au bout de trois rounds de négociations laborieuses à Bruxelles, la Grèce espère avoir assuré sa survie budgétaire en décrochant quatre mois de financement supplémentaire, jusqu'à fin juin, mais sous des conditions extrêmement strictes imposées par ses partenaires.
Pour le gouvernement Tsipras, qui n'en revendique pas moins samedi d'avoir "tourné une page" dans ses relations avec la zone euro et changé "d'orientation" la politique du pays, l'enjeu est désormais d'exploiter l'étroite marge de manoeuvre que lui laisse le compromis pour imprimer sa marque.
C'est ce qu'il va essayer de faire à travers le catalogue de réformes que ses créanciers, désormais désignés sous le terme d'"institutions" (UE, BCE et FMI) -le terme "troïka" étant banni- lui ont demandé de présenter d'ici lundi soir pour entériner l'accord de financement.
En cas de rejet des propositions grecques, "nous aurons un problème (), l'accord est mort, mais cela ne sera pas le cas", a assuré le ministre grec des Finances Yanis Varoufakis à Bruxelles. Les 18 autres ministres des Finances de la zone euro se prononceront sur cette liste de réformes lors d'un Eurogroupe téléphonique mardi.
Le président français François Hollande a salué samedi un "bon compromis".
Le gouvernement grec, selon M. Varoufakis, devrait être dispensé d'inclure des mesures que lui demandaient jusqu'alors ses créanciers pour boucler le plan de sauvetage, initialement prévu pour s'achever le 28 février: nouvelle hausse de TVA, nouvelles coupes dans les retraites ou poursuite de la dérégulation du marché du travail.
C'est ce qui permet à Athènes de se présenter désormais en "coauteur des réformes et de sa destinée" plutôt qu'en élève soumis.
- La Grèce qui "plie" ou gagne du temps? -
Mais rien ne garantit qu'Alexis Tsipras pourra décrocher un feu vert de la zone euro sur la mise en oeuvre de la partie la plus débattue de son programme: hausse du salaire minimum, des retraites les plus faibles, protection des saisies immobilières ou arrêt des privatisations.
Toutes ces mesures ont un coût budgétaire, or dans l'accord trouvé, la Grèce s'engage à ne pas légiférer avec un "impact négatif sur les objectifs budgétaires, la reprise économique et la stabilité financière".
D'autant que ce compromis exclut que le gouvernement grec puisse utiliser les quelque onze milliards restant dans le fonds de stabilité des banques grecques pour autre chose que la sauvegarde du système financier. Et que la zone euro ne déboursera pas l'argent restant dans le programme d'aide (3,6 milliards) avant une seconde évaluation des réformes, en avril, réduisant d'autant la marge de manoeuvre budgétaire d'Alexis Tsipras.
Seul bol d'air financier: le possibilité de dégager un excédent budgétaire primaire plus faible que ne l'exigeaient initialement ses créanciers.
Le gouvernement grec, dès vendredi soir, s'est d'ailleurs engagé à donner la priorité aux réformes les plus consensuelles, comme la lutte contre l'évasion fiscale, la corruption, la reconstruction de l'administration publique, mais aussi "la réponse à la crise humanitaire".
"Les mesures qui ont un coût financiers sont gelées", en déduisait cependant le quotidien de centre-gauche Ethnos, soulignant toutefois, à l'instar du reste de la presse grecque, le "temps" gagné par la Grèce pour conduire ses propres réformes.
Matthieu Pigasse, directeur général de la banque Lazard qui conseille le gouvernement grec sur la restructuration de la dette, a d'ailleurs estimé samedi qu'il fallait "laisser du temps et de l'oxygène" à la Grèce.
Interprétation radicalement différente pour la presse allemande conservatrice selon laquelle "la Grèce peut enterrer ses rêves politiques" (Die Welt) tandis que le toujours abrupt quotidien populaire Bild se réjouissait d'un "succès pour Schäuble", le ministre allemand des Finances, face à une Grèce qui "plie".
"Les grecs n'ont plus rien à obtenir. Je suis sûr qu'ils seront toujours obligés de céder, comme hier", prédisait Daniel Gros, directeur du Centre pour les études politiques européennes, alors qu'Athènes devra de nouveau négocier avec ses créanciers pour un nouvel accord avant la fin juin.
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