Le mobile antisémite apparaît désormais "clairement" dans la profanation du cimetière juif de Sarre-Union (Bas-Rhin) selon le parquet, qui a demandé et obtenu mercredi la mise en examen des cinq adolescents interpellés dans cette affaire.
"Malgré les dénégations des intéressés, la connotation et le mobile antisémites de leur comportement apparaissent désormais clairement" au vu des éléments recueillis par l'enquête, a déclaré le procureur de Saverne, Philippe Vannier.
Dans la soirée, après leur présentation au juge d'instruction, les cinq mineurs ont été mis en examen pour "profanation ou violation" de sépultures "en raison de l'appartenance des défunts à une religion" et pour "dégradations volontaires de biens destinés à l'utilité publique", comme l'avait requis le parquet.
Tous ont été placés sous contrôle judiciaire "avec interdiction de se rendre à Sarre-Union", et quatre d'entre eux ont été soumis à une mesure de placement en centre éducatif, dont l'un dans un centre fermé, tandis que le cinquième a été "confié à un tiers digne de confiance", a précisé le procureur.
Interpellés lundi après que l'un d'eux se fut rendu de lui-même à la gendarmerie, effrayé par le retentissement médiatique de l'affaire, les cinq garçons, âgés de 15 à 17 ans, ont "tous reconnu leur participation aux dégradations", avait indiqué plus tôt M. Vannier.
"Ils continuent d'affirmer qu'ils ne se sont pas sentis antisémites", mais leur comportement a montré qu'un "fond d'antisémitisme était à l'oeuvre": les adolescents ont ainsi décrit des "gestes et paroles révélatrices", comme des "saluts nazis", des crachats sur des étoiles de David, ou encore des insultes antisémites comme "sales juifs" ou "sale race".
- "Frénésie collective" -
Le saccage, qui remonte à jeudi et n'a été découvert que dimanche, semble être "parti d'un jeu, jeu qui a dérapé", a poursuivi le procureur: un premier acte a déclenché une "sorte de frénésie collective", qui a conduit les adolescents à dégrader quelque 250 sépultures ainsi qu'un monument aux victimes de la Shoah.
Plusieurs dizaines de prélèvements ont été saisis et mis sous scellés par les gendarmes.
Escortés par des gendarmes, les cinq adolescents étaient arrivés ensemble au milieu de la matinée au tribunal de grande instance de Saverne, leurs visages cachés par des couvertures. Leurs auditions devant le juge d'instruction ont ensuite duré jusque tard dans la soirée avant leur mise en examen.
Les prévenus encourent sept ans de prison, a rappelé le procureur, ajoutant que la loi prévoiyait pour eux une excuse atténuante, qui peut réduire cette peine par deux, mais que cette excuse pouvait être écartée par le tribunal.
"Nous ne sommes pas encore en train de discuter de la sanction", a-t-il toutefois précisé, expliquant que l'enquête se poursuivait pour déterminer les responsabilités de chacun, et suggérant qu'ils puissent se voir demander d'effectuer des travaux de réparation.
Selon le procureur, l'un d'entre eux avait "une aura" vis-à-vis des autres: il "semble avoir exercé une emprise sur les autres".
Cette profanation de grande ampleur a suscité depuis sa découverte dimanche une vive indignation.
"Profaner, c'est insulter toutes les religions", avait déclaré mardi François Hollande, lors d'une cérémonie de recueillement organisée sur place en présence de nombreux responsables politique et religieux.
Le chef de l'Etat, qui avait lui-même parcouru les allées de la nécropole, a également promis aux juifs de France que la République les défendrait "de toutes ses forces".
L'incompréhension est d'autant plus grande à Sarre-Union que plusieurs des jeunes interpellés étaient scolarisés dans le lycée de la ville. Selon le maire, Marc Séné, ils n'étaient pas issus de "familles qui posaient des problèmes particuliers".
"Certains parents ont manifesté en présence des gendarmes une réprobation très forte à l'égard" de l'acte de leurs enfants, a reconnu le procureur.
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