Les députés ont adopté un amendement au projet de loi Macron prévoyant que les chauffeurs routiers étrangers travaillant dans l'Hexagone soient payés au Smic français. Une "révolution" dans la lutte contre le dumping social selon les syndicats.
Ce texte, présenté par le gouvernement et adopté samedi, doit renforcer la "lutte contre la concurrence sociale déloyale", qui affaiblit les entreprises françaises handicapées par un coût du travail largement supérieur à celui de l'est de l'Europe.
"Tout conducteur qui effectue des opérations de cabotage, à l'occasion d'un transport international, bénéficiera des règles sociales et du salaire minimum en vigueur en France dans les secteurs concernés", et les transporteurs étrangers en irrégularité "pourront donc être poursuivis pour travail illégal", a souligné le secrétariat d'Etat aux Transports, dans un communiqué de presse.
- Protéger le pavillon français -
La CGT Transports se réjouit d'"une révolution pour ce secteur".
Actuellement, la pratique du "cabotage" permet à un transporteur étranger de réaliser trois opérations de chargement et déchargement sur le sol français, dans une limite de sept jours, en s'affranchissant des règles sociales en vigueur en France.
Cela permet à des entreprises situées en France de bénéficier d'une prestation de transport largement inférieure en coûts à celles proposées par les transporteurs français, incapables de s'aligner.
En effet, le salaire moyen net d'un routier français est de 2.595 euros, frais de déplacement et primes diverses inclus, contre 1.290 euros en Hongrie, 1.524 euros en Slovaquie ou encore 1.428 euros en Pologne.
Si l'amendement parvient à passer le cap de la navette parlementaire, les routiers étrangers passeraient sous le statut de travailleurs détachés, qui impose les règles sociales françaises sur le salaire minimum (9,61 euros bruts en 2015) ou les congés par exemple.
Une mesure pour protéger le pavillon français était attendue de longue date par les partenaires sociaux, qui viennent d'échouer à trouver un accord sur la question des salaires.
L'OTRE, qui représente les PME du transport routier, avait conditionné la reprise des négociations salariales à l'ouverture d'un dialogue plus vaste comprenant le problème du dumping social, et "se félicite" de cette adoption.
Elle juge nécessaire que "les décrets d'application (soient) pris () avant l'été", mais aussi que soit menée "une campagne importante de contrôle des véhicules de transport routier étrangers", et "des plus importantes plateformes logistiques et de distribution".
- 'Conséquences pénales' -
"Cette question aurait mérité un débat plus large", regrette pour sa part Nicolas Paulissen, délégué général de la principale fédération patronale de la branche (FNTR).
Il s'agit d'une "réponse partielle et insuffisante au problème de distorsion de concurrence", a-t-il commenté, estimant que cette initiative doit "être accompagnée d'une démarche européenne".
Le gouvernement va dans ce sens, puisque Alain Vidalies, secrétaire d'Etat chargé des Transports "va continuer de promouvoir, auprès des institutions européennes et des autres Etats membres, le projet d'une Agence européenne de coordination des contrôles dans le transport routier de marchandises".
L'amendement prévoit également que "l'entreprise bénéficiaire du transport interne en France est considérée comme un donneur d'ordre, y compris avec toutes les conséquences pénales que peut avoir la non-application du détachement", a détaillé Jérôme Vérité, secrétaire général de la CGT Transports.
Jeudi, le Premier ministre Manuel Valls avait présenté un plan de lutte contre les fraudes au détachement, qui prévoit notamment un alourdissement des sanctions.
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