Syndicats et patronat ouvrent mardi une nouvelle négociation sur les retraites complémentaires, avec l'impératif de trouver un accord pour sauver l'Agirc-Arrco d'un naufrage imminent, au risque de devoir diminuer les pensions.
L'équation est simple. Si le patronat et les syndicats, gestionnaires de l'Agirc (cadres) et de l'Arrco (tous les salariés du privé) échouent à élaborer d'ici à fin juin des solutions pour sortir du rouge les deux régimes, auxquels cotisent plus de 18 millions de personnes (12 millions de bénéficiaires), "en 2018, on baisse les pensions des cadres", préviennent des négociateurs.
L'arrivée des générations de l'après-guerre à l'âge de la retraite gonfle les dépenses, tandis que la crise économique avec un fort taux de chômage pèse sur les recettes, en réduisant les rentrées de cotisations sociales.
Les réserves accumulées par les deux régimes pendant les années fastes fondent rapidement pour éponger les déficits. Au point que si rien n'est fait, celles de l'Agirc pourraient être épuisées en 2018, celles de l'Arrco en 2027.
Or, la pension complémentaire représente approximativement 60% de la retraite totale des cadres, un tiers de celle des non-cadres.
Si le patronat et les syndicats s'accordent depuis des années pour ajuster les paramètres à la situation économique, la tâche s'annonce beaucoup plus ardue cette année au regard des déficits (1,24 milliard pour l'Agirc en 2013, 405 millions pour l'Arrco) et de l'assèchement des réserves.
"L'urgence absolue est de trouver une solution pour l'Agirc", résume Jean-Louis Malys, négociateur CFDT.
"L'objectif n'est pas forcément qu'en 2018 il y ait un déficit zéro dans l'Agirc comme dans l'Arrco. Il faut prendre des mesures qui repoussent le seuil d'épuisement des réserves de l'Agirc autour de 2020-2025. Après il y aura un système de pilotage, de rencontres régulières", complète son homologue de la CFE-CGC, Serge Lavagna.
- 'L'épouvantail' des mesures d'âge -
Les partenaires sociaux disposent d'une série d'outils aux incidences très diverses.
Compte tenu de la situation des cadres, il leur faut regarder ce qui rapporte le plus, et à court terme. Et les gains les plus importants découlent notamment d'un recul de l'âge de départ, "l'épouvantail" agité par le Medef, selon les termes d'un syndicaliste.
Imposer des décotes temporaires ou définitives aux actifs qui prendraient leur retraite avant un certain âge, qui pourrait être 67 ans, est l'autre principale carte abattue par le Medef.
"Il n'y aura ni mesure d'âge ni décote", rétorque la CGT pour laquelle l'équilibre est à chercher dans des hausses de cotisations de l'Agirc, et dans l'alignement des salaires hommes-femmes. Autant de pistes qui seront balayées par le patronat au motif qu'elles alourdissent le coût du travail.
Entre les deux, du côté syndical, FO, la CFDT, la CFE-CGC et la CFTC penchent pour un panache de mesures mais avec "des efforts équilibrés".
La CFE-CGC sera notamment obligée de faire des concessions. Si elle veut trouver des alliés pour éviter la fusion des régimes Agirc-Arrco, synonyme "de la disparition petit à petit de la représentation collégiale de cadres", elle devra "regarder toutes les solutions", tout en se fixant, comme les autres syndicats, des lignes rouges.
Pour FO, "il n'est pas question que l'on réduise les droits à la retraite", pas plus que de toucher aux bornes d'âge car le sujet relève du régime général, et donc de la loi, et non des partenaires sociaux.
Les pensions de réversion "sont une piste possible, sensible", mais il "n'est pas question de servir de poisson pilote" au régime général, "on attend le rapport Fragonard" sur les retraites et les avantages familiaux, explique Patrick Poizat (CFTC).
Mais "quelles que soient les mesures que l'on retiendra, ça va mécontenter toutes les franges de la population", prédit un négociateur.
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