L'accord sur un cessez-le-feu en Ukraine, signé jeudi à Minsk après une nuit marathon de négociations entre dirigeants allemand, français, ukrainien et russe, apporte un soulagement à ce pays déchiré par un conflit meurtrier, mais une paix durable est encore très incertaine, selon les Européens.
"La négociation été très difficile, et nous ne nous attendons pas à une mise en oeuvre facile du processus", a déclaré jeudi soir le président ukrainien Petro Porochenko, qui participe au sommet des dirigeants européens à Bruxelles, largement dominé par l'Ukraine et la Grèce.
Cet "accord sur l'essentiel" annoncé par Vladimir Poutine, "ne garantit pas un succès durable", estime le président français François Hollande, alors que la chancelière allemande Angela Merkel a souligné que de "gros obstacles" subsistaient avant un retour à la paix dans l'Est de l'Ukraine.
Cette région est meurtrie par dix mois de conflit qui ont fait plus de 5.300 morts et ont conduit à une confrontation inédite depuis la Guerre froide entre Moscou et les Occidentaux.
Les Etats-Unis ont "salué" l'accord, tout en réclamant qu'il soit "suivi de mesures immédiates et concrètes pour remplir les engagements de toutes les parties".
Signé par les séparatistes pro-russes et Kiev, l'accord prévoit un cessez-le-feu à partir de dimanche minuit heure de Kiev (samedi 22H00 GMT) et le retrait des belligérants et de leurs armes lourdes permettant la création d'une zone tampon d'une profondeur de 50 à 140 kilomètres. Les précédents accords prévoyaient une zone de 30 km.
Il prévoit en outre la mise en place d'une nouvelle Constitution d'ici fin 2015 prévoyant une "décentralisation" des régions de Donetsk et Lougansk, en accord avec les représentants de ces zones.
Arraché après 16 heures de pourparlers entre Vladimir Poutine, Petro Porochenko, Angela Merkel et François Hollande, l'accord évite à court terme à la Russie un durcissement des sanctions occidentales et compromet la perspective de livraisons d'armes américaines à Kiev, mais ne règle pas définitivement le conflit, soulignent des analystes.
M. Poutine a ainsi relevé que les séparatistes attendaient des soldats ukrainiens encerclés à Debaltseve, localité devenue ces dernières semaines un point chaud particulièrement symbolique, qu'ils "déposent les armes" afin que le cessez-le-feu puisse entrer en vigueur.
"Les représentants du gouvernement ukrainien considèrent qu'il n'y a pas d'encerclement et que tout se fera assez facilement. J'ai depuis le début des doutes", a-t-il déclaré.
L'accord, "c'est certainement un pas dans la bonne direction, même si je sais que ça ne règlera pas tout", a réagi la chef de la diplomatie de l'Union européenne Federica Mogherini.
"Il faut qu'on soit très clair envers Vladimir Poutine, qui doit savoir que les sanctions ne seront pas levées à moins que son attitude change", a insisté pour sa part le Premier ministre britannique David Cameron.
- Chars russes -
Selon le porte-parole de l'armée ukrainienne, au moment où MM. Poutine et Porochenko négociaient d'arrache-pied à Minsk, une cinquantaine de chars, des lance-roquettes et des blindés ont pénétré sur le territoire ukrainien depuis la Russie.
L'accord "n'est pas une solution globale et encore moins une percée", a renchéri le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, tout en saluant un "pas en avant qui nous éloigne d'une spirale d'escalade militaire", mais "sans euphorie".
Les dirigeants séparatistes ont, eux, estimé que l'accord pouvait faire espérer une "solution pacifique" au conflit.
Le retrait des armes lourdes risque toutefois de "prendre plus de 2, 3 jours", a prévenu Andreï Pourguine, l'un des hauts responsables des séparatistes à Donetsk.
L'accord reprend en grande partie ceux signés à Minsk en septembre et qui prévoyaient déjà cessez-le-feu, retrait des pièces d'artillerie et échanges de prisonniers.
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