Le Conseil de sécurité de l'ONU doit adopter jeudi une résolution dont l'objectif est d'étrangler financièrement le groupe jihadiste Etat islamique (EI), qui tire des millions de dollars de la contrebande de pétrole, du trafic d'antiquités et des rançons.
Le texte, co-parrainé par les Etats-Unis et la Russie, rappelle aux Etats l'obligation de s'abstenir de toute transaction pétrolière directe ou indirecte avec l'EI et de geler tous les avoirs financiers du groupe. Le Conseil leur demande de signaler à l'ONU les saisies de pétrole brut ou raffiné venu de zones contrôlées par les jihadistes en Syrie et en Irak.
La résolution étend à la Syrie l'interdiction de faire commerce de biens culturels volés, qui s'appliquait déjà à l'Irak.
Elle recommande de mieux contrôler les mouvements des camions et avions avec les zones tenues par l'EI, susceptibles de transporter des marchandises provenant de pillages (or, produits électroniques, cigarettes). Cette recommandation s'adresse en particulier à la Turquie, principal point de passage.
Cette initiative s'inscrit dans un contexte de pressions accrues sur les jihadistes. Selon des responsables américains, "l'organisation terroriste la mieux financée au monde" a perdu du terrain sous les coups de boutoir de la coalition internationale, ses revenus pétroliers sont en baisse et elle doit s'attendre à une vaste offensive terrestre en Irak.
Selon un rapport de l'ONU datant de novembre, les jihadistes gagneraient de 850.000 à 1,65 million de dollars par jour en vendant du pétrole à des intermédiaires privés. Mais certains experts estiment que ces revenus ont diminué de moitié sous l'effet des bombardements menées par la coalition et de la baisse du prix du brut sur les marchés.
- 'Resserrer l'étau' -
Cette résolution très technique, qui s'applique aussi à d'autres groupes extrémistes comme le Front al-Nosra, est placée sous le chapitre 7 de la Charte de l'ONU. Celui-ci prévoit la possibilité de sanctions pour les récalcitrants.
En fait, cette résolution regroupe et détaille toute une panoplie de mesures prises par le Conseil depuis que l'EI s'est emparé de larges pans du territoire en Syrie et en Irak il y a près d'un an.
Par ailleurs, un régime de sanctions (gel d'avoirs, embargo sur les armes) s'applique déjà depuis de nombreuses années aux organisations et individus affiliés de près ou de loin à al-Qaïda.
Le Conseil avait aussi adopté en août 2014 une résolution visant à couper les fonds aux jihadistes en menaçant de sanctionner les pays qui leur achèteraient du pétrole. Il s'agissait également d'endiguer le flux de combattants étrangers partis rejoindre l'EI en Irak et en Syrie et qui dépasse désormais les 20.000.
La nouvelle résolution "va resserrer un peu l'étau et montrer la détermination du Conseil même si son impact à court terme est difficile à évaluer", explique un diplomate occidental. Il juge cependant "positif" que la Russie soit à l'origine de cette initiative. Moscou, allié de Damas, a bloqué plusieurs résolutions du Conseil depuis le début de la crise syrienne.
Faire appliquer ces décisions ne sera pas facile vu le nombre d'intermédiaires qui trafiquent avec les jihadistes. Le Conseil recommande aussi une nouvelle fois de ne pas verser de rançon en cas d'enlèvement mais plusieurs pays européens le font par des voies détournées.
La principale nouveauté de la résolution est une interdiction spécifique du trafic des oeuvres d'art et antiquités dérobées en Syrie.
"Tous les Etats membres, indique le texte, devront prendre les mesures nécessaires pour prévenir le commerce de biens culturels irakiens et syriens" sortis illégalement d'Irak depuis août 1990 et de Syrie depuis mars 2011 (date du début de la crise syrienne).
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