La saga Keystone XL entre dans son dernier acte: le Congrès à majorité républicaine a autorisé mercredi la construction de l'oléoduc entre le Canada et les Etats-Unis, contesté par les écologistes, et malgré le veto attendu de Barack Obama.
Après une interminable bataille politique, et plus de six ans après la première demande de permis de construire de l'opérateur canadien TransCanada, la Chambre des représentants a adopté en dernière lecture une loi autorisant le projet transfrontalier de 1.900 km, dont 1.400 aux Etats-Unis.
"Keystone est bon pour l'emploi. Bon pour l'environnement. Il est sûr. Il améliore notre indépendance énergétique. Nous devons dire oui au Canada", a déclaré le républicain Fred Upton.
Le veto inévitable de Barack Obama ne signera pas la mort de Keystone XL. Le président américain s'oppose à la loi républicaine car elle lui ôte le pouvoir d'accorder le permis de construire à l'opérateur TransCanada, et il souhaite conserver ce pouvoir. Les républicains ont voulu abréger le processus administratif, qui a selon eux trop duré.
Car ce qui n'était qu'un projet pétrolier de plus s'est transformé au fil des années en conflit partisan entre démocrates et républicains, chacun voyant dans l'oléoduc une menace majeure ou une opportunité historique.
Avec les écologistes, les démocrates mettent en garde contre les risques de fuite, et dénoncent l'extraction énergivore du brut des sables bitumineux. Ils dénoncent aussi une faveur accordée à une entreprise étrangère.
"La seule chose accomplie par les républicains avec ce vote est d'avoir démontré leur loyauté déterminée envers leurs grands donateurs du secteur pétrolier qui ont mis cet oléoduc en tête de leur liste de Noël", a dit le directeur de la grande association de défense de l'environnement Sierra Club, Michael Brune.
Les républicains, appuyés par le gouvernement canadien conservateur de Stephen Harper, avancent trois grands arguments. Le transport par oléoduc est plus sûr que par chemin de fer. Il y a ensuite l'indépendance énergétique: mieux vaut importer du brut canadien que du pétrole du Golfe, du Venezuela ou d'autres pays moins amis.
Enfin, le chantier créera environ 42.000 emplois directs et indirects, un chiffre calculé par le département d'Etat.
Keystone XL servirait de raccourci à l'oléoduc Keystone original pour transporter, avec une capacité accrue de 40%, du pétrole brut extrait des sables bitumineux de l'Alberta, dans l'ouest du Canada, jusqu'au Nebraska (centre des Etats-Unis), d'où il pourra rejoindre les raffineries du golfe du Mexique via un réseau d'oléoducs déjà existants.
A ce stade, le président américain n'est officiellement ni pour, ni contre le projet: il continue d'évaluer s'il servira "l'intérêt national", le terme légal pour délivrer ou refuser le permis.
- Veto insurmontable ? -
Barack Obama est prudent pour ne pas dévoiler le fond de sa pensée, mais son scepticisme est évident.
"Il y a eu cette tendance à présenter ce projet comme une formule magique pour les maux de l'économie américaine et il est difficile, sur le papier, de savoir d'où vient" cette croyance, a-t-il dit en décembre.
La question environnementale semble en revanche aller dans le sens d'un feu vert. Barack Obama, qui a fait de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre une priorité de son second mandat, avait averti en 2013 qu'il n'approuverait pas Keystone XL s'il "exacerbait de manière significative le problème de la pollution carbone".
Mais le département d'Etat, dans un rapport environnemental en janvier 2014, a conclu que l'oléoduc n'aurait pas d'impact significatif sur le taux d'exploitation des sables bitumineux canadiens, qui disposent d'autres débouchés commerciaux que les Etats-Unis. Autrement dit, les gaz à effet de serre liés à ces sables seront émis quoiqu'il arrive.
Le Canada est le premier fournisseur de pétrole aux Etats-Unis, représentant environ un tiers des importations américaines, soit autant que tous les pays membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), selon des chiffres de 2014.
En cas de veto, les républicains auront le choix d'organiser un nouveau vote, mais il leur faudra une majorité de deux tiers, ce qui requerrait le soutien de nombreux démocrates.
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