Le jour est enfin venu pour Dominique Strauss-Kahn: poursuivi pour proxénétisme aggravé aux côtés de 13 autres prévenus alors qu'il a toujours nié tout fondement à cette accusation, il va devoir livrer sa version de l'affaire dite du Carlton au tribunal correctionnel.
Son arrivée mardi matin n'est pas passée inaperçue, puisqu'il a été accueilli par trois militantes Femen aux cris de "Macs, clients, déclarés coupables!" L'une d'elles s'est jetée sur le capot de la voiture de DSK, avant d'essayer d'escalader le pare-brise puis d'être appréhendée par la police. Le véhicule s'est à peine arrêté.
Trois ans et demi après les premières fuites dans la presse sur son éventuelle implication dans cette affaire, l'ancien directeur du FMI, âgé de 65 ans, va avoir deux jours et demi pour tenter de se disculper à la barre. Il encourt 10 ans de prison et 1,5 million d'euros d'amende.
Costume bleu marine et cravate claire, DSK a été le premier à s'installer dans la salle d'audience, semblant relativement détendu, discutant avec ses avocats, saluant certains de ses co-prévenus.
L'audience s'est ouverte à l'heure prévue, et David Roquet, ex-directeur d'une filiale d'Eiffage, a été le premier appelé à la barre.
Lorsque DSK demanda à être entendu, dès la mi-octobre 2011, pour faire cesser les "insinuations malveillantes" sur son rôle dans un réseau de recrutement de prostituées pour animer des soirées chaudes, il venait à peine d'échapper à la justice pénale américaine.
Le scandale sexuel du Sofitel de New York venait de briser sa carrière politique et la nouvelle affaire risquait de ruiner ce qu'il lui restait de réputation.
Après qu'il eut été mis en examen le 26 mars 2012, le parquet avait toutefois requis un non-lieu concernant son renvoi en correctionnelle, estimant qu'il avait été un bénéficiaire mais pas un organisateur des festivités.
Depuis le début, il a laissé à ses avocats, le réputé Henri Leclerc en tête, le soin de dénoncer une interprétation abusive du droit.
"Motivation politique, idéologique, morale", voilà comment ses conseils avaient qualifié le renvoi de DSK devant le tribunal correctionnel.
Le public était nombreux à se presser devant le palais de justice de Lille, tous ceux qui le souhaitaient n'ont pu prendre place à l'intérieur.
Lundi soir, l'avocat de Nafissatou Diallo, qui avait accusé Dominique Strauss-Kahn d'agression sexuelle au Sofitel, s'est dit "rassuré" que l'ancien directeur du FMI doive "rendre des comptes" devant la justice en France, contrairement à ce qui s'était passé aux Etats-Unis, où le dossier s'était clos par un accord financier amiable au civil.
DSK sera notamment confronté à ses accusatrices, au milieu peut-être d'allusions à ses goûts sexuels. A Jade, en particulier, dont les témoignages depuis le début du procès sur le monde de la prostitution ne manquent pas de glacer l'audience.
- 'Roi de la fête' ? -
Le 2 février à l'ouverture du procès, il avait assuré par avance le président du tribunal de sa bonne volonté.
"On en reparlera la semaine prochaine", lui avait dit Bernard Lemaire. "Bien sûr", avait alors répondu, affable, Dominique Strauss-Kahn.
Entre-temps, le président du tribunal a pris soin de compartimenter les débats - aucun sujet ne devait être abordé sans la présence du prévenu concerné.
Durant ces audiences, la question de savoir si DSK était au courant du fait que ses partenaires sexuelles d'un jour étaient des prostituées n'a ainsi pas été posée.
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