Le Tribunal correctionnel de Bordeaux s'est penché lundi sur les fonds et flux financiers des comptes de Liliane Bettencourt, une comptabilité floue où les règlements en espèces le disputent aux comptes en Suisse, qui ont notamment permis à la milliardaire d'acquérir en 1997 l'île seychelloise d'Arros.
Avant d'entendre dans le détail mardi l'ex-ministre UMP Eric Woerth, le tribunal a déjà effleuré la question de la remise présumée de 50.000 euros au député de l'Oise, poursuivi pour recel, en entendant Michel Bruyas, expert financier chargé pendant l'instruction d'éplucher la comptabilité de Liliane Bettencourt.
Une "comptabilité" où "la chronologie n'est pas respectée", où "les imputations sont erratiques" et où "on ne peut confirmer la matérialité des écritures", a détaillé l'expert. "On a des certitudes sur les mouvements financiers, mais on n'a pas de certitude sur le bénéficiaire des mouvements financiers", a-t-il résumé, interrogé par le procureur Gérard Aldigé sur un retrait effectué le 18 janvier 2007 par l'ex-comptable de la milliardaire, Claire Thibout. Principale témoin à charge, celle-ci témoignera mardi par visio-conférence.
"Nous avons une caisse tenue par Mme Thibout, qui n'est pas miraculeusement fiable", a renchéri Me Jean-Yves Le Borgne, l'avocat d'Eric Woerth, pour jeter le doute sur les déclarations de Claire Thibout visant son client.
- 'Une mare de comptes en Suisse' -
Interrogé sur des transferts depuis les comptes en Suisse des Bettencourt entre 2007 et 2009, portant sur un total de quatre millions d'euros, une somme qui aurait pu être utilisée dans le cadre d'une financement politique occulte, l'ex-gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt, Patrice de Maistre, a nié avoir "organisé ces transferts".
"On m'accuse d'avoir pris 4 millions d'euros. Quand on n'a pas trouvé d'argent chez certains hommes politiques, on a dit +vous l'avez gardé+", a-t-il ajouté, s'indignant qu'on lui demande de "justifier l'utilisation de ces fonds par M. et Mme Bettencourt", qui, selon lui, possédaient une "mare de comptes en Suisse".
Auparavant, le tribunal s'est penché sur l'île d'Arros, acquise par la milliardaire en 1997, à l'insu du fisc, pour 18 millions de dollars. L'existence de cette île et son financement illicite, à partir de deux comptes en Suisse, avaient été révélés lors de la diffusion dans la presse en 2010 d'écoutes clandestines réalisées au domicile de Mme Bettencourt par son ex-majordome.
En décembre 2006, la propriété de l'île avait été transférée, via une "cascade d'actes juridiques complexes", à la Fondation pour l'équilibre écologique, esthétique et humain (FEEEH), basée au Liechtenstein, sans que la milliardaire en soit informée, selon l'accusation. Parmi les bénéficiaires, le nom de François-Marie Banier, l'ex-confident de la milliardaire, figurait à côté de celui de trois associations de recherche médicale.
François-Marie Banier, un des principaux prévenus pour "abus de faiblesse" aux dépens de l'héritière du groupe de cosmétiques L'Oréal, a reconnu l'avoir "encouragée" à acquérir l'île, tout en affirmant avoir été "entièrement étranger à ce montage très compliqué" faisant de lui le bénéficiaire et n'avoir été "alerté" qu'"une fois les choses faites".
- L'ex-infirmier toujours dans le coma -
Le tribunal s'est aussi intéressé à Carlos Vejarano, ressortissant espagnol, chargé de la gestion de l'île seychelloise, poursuivi pour "abus de faiblesse" mais également pour "abus de confiance". Il est en effet soupçonné d'avoir détourné des fonds destinés à la gestion de l'île.
Autre absent du procès - comme l'ex-infirmier Alain Thurin, toujours dans un "coma artificiel" à la suite de sa tentative de pendaison il y a 15 jours -, Carlos Vejarano est aujourd'hui résident au Mexique et a invoqué par courrier des problèmes de santé pour justifier son absence.
A défaut, le tribunal s'est tourné vers Patrice de Maistre, chargé par le couple Bettencourt de "faire baisser" les dépenses de gestion de l'île qui atteignaient entre quatre et cinq millions d'euros par an. Celui-ci a nié avoir été au courant de "prélèvements" allant du compte de la société de gestion de l'île vers le compte personnel de Carlos Vejarano. Il a toutefois reconnu avoir proposé à Liliane Bettencourt de verser deux millions d'euros à Carlos Vejarano à un moment où celui-ci avait "beaucoup de demandes de journalistes" au sujet d'Arros.
Reprise de l'audience mardi à 09H30.
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