Près de quatre ans après le scandale sexuel du Sofitel qui avait brisé net une ascension politique semblant irrésistible, Dominique Strauss-Kahn s'est retrouvé lundi sur le banc des prévenus, accusé de proxénétisme aggravé, aux côtés de 13 autres personnes mêlées à l'affaire dite du Carlton de Lille.
L'ancien directeur du Fonds monétaire international (FMI), longtemps favori des sondages en vue de la présidentielle 2012 avant sa chute faustienne à New York devant les caméras du monde entier, est soupçonné d'avoir été au coeur d'un réseau de prostitution mis en place par ses amis du Nord.
Il encourt jusqu'à 10 ans de prison et 1,5 million d'euros d'amende, alors que le parquet, durant l'instruction, avait requis le non-lieu en ce qui le concerne.
Pour l'accusation, Dominique Strauss-Kahn, 65 ans, était "le roi de la fête" des nombreuses parties fines organisées avec des prostituées dans le Nord mais aussi à Paris, ou même, à trois reprises, à Washington, alors qu'il était encore à la tête du FMI.
Pour sa défense, DSK admet être adepte du libertinage mais affirme avoir ignoré la qualité des jeunes femmes participant aux soirées.
Ouvrant l'audience, peu après 14H00, le président du tribunal, Bernard Lemaire, a commencé à égrainer les noms des prévenus, de leurs avocats et des parties civiles, ainsi que les chefs de poursuite, devant une salle comble où figuraient nombre de journalistes de la presse nationale et internationale.
DSK avait pénétré dans la salle avec son avocat, Me Henri Leclerc, octogénaire ténor du barreau, près de trois quarts d'heure avant le début du procès, qui doit durer trois semaines.
Son témoignage n'est cependant pas prévu avant le 11 février.
DSK comparaît aux côtés notamment d'un hôtelier, d'un policier, d'un avocat et d'entrepreneurs, ainsi que du médiatique "Dodo la Saumure", tenancier revendiqué d'établissements "de plaisir" en Belgique.
Avant l'ouverture du procès, en sobre costume noir et cravate foncée, l'ancien patron du FMI est apparu devisant l'air sérieux, détendu, mais les traits marqués, les mains dans les poches, avec son avocat Me Henri Leclerc.
Dodo la Saumure assis avec sa compagne Bea Legrain, également prévenue, s'est retourné paisiblement pour regarder la salle se remplir.
Le tribunal correctionnel de Lille doit, avant tout débat sur le fond, régler des questions de procédure. L'avocat du policier Jean-Christophe Lagarde a d'ores et déjà déposé une requête en nullité, que le tribunal a commencé à examiner vers 15H00.
Se fondant sur les déclarations d'un ancien commissaire de la police judiciaire de Lille, Joël Specque, dans un livre autobiographique, Me Olivier Bluche estime qu'une enquête "officieuse" a été menée dès juin 2010, bien avant l'ouverture de l'enquête préliminaire en février 2011.
"On demande au tribunal de juger d'une affaire en lui cachant huit mois d'investigation", avance-t-il, bafouant ainsi, selon lui, le droit à un procès équitable.
Les avocats peuvent déposer une "QPC", question prioritaire de constitutionnalité, devant le tribunal, qui doit l'examiner. S'il l'estime valable, les débats sont le plus souvent suspendus jusqu'à ce que la question soit tranchée, ce qui peut prendre plusieurs mois.
- Huis clos rejeté -
Par ailleurs, l'avocat d'anciennes prostituées qui se sont portées parties civiles a demandé le huis clos.
"Le tribunal rejette la demande de huis clos", a déclaré après une très courte interruption de séance le président du tribunal Bernard Lemaire, qui a notamment estimé que les parties civiles ont "toujours le choix de ne pas s'exprimer, qu'elles peuvent aussi se contenter de confirmer ou pas leurs déclarations ou de répondre aux questions qu'elles souhaitent et qu'elles estiment ne pas être attentatoires à leur dignité".
Lors de son renvoi devant le tribunal correctionnel, ses avocats avaient déclaré que DSK se rendrait "sereinement" devant la justice, fort des réquisitions de non-lieu prises par le parquet dans cette affaire. L'un de ses conseils, Richard Malka, avait parlé d'un "acharnement" des juges, fondé sur la morale plutôt que sur le droit.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.