Après l'échec du plan Ecophyto, le ministre de l'agriculture présente une nouvelle méthode, fondée sur la recherche et l'innovation, de réduction de moitié des pesticides repoussant l'objectif de 2018 à 2025, avec un palier intermédiaire du quart en 2020.
A l'issue du Grenelle de l'environnement en 2008, la précédente majorité avait lancé son plan Ecophyto dont l'ambition était de réduire "si possible" de 50% l'usage des pesticides d'ici à 2018.
Mais le succès était loin d'être atteint puisque l'utilisation de produits chimiques en agriculture a progressé de 5% par an en moyenne entre 2009 et 2013.
Ce premier plan "a permis d'éloigner les substances les plus dangereuses" mais s'est soldé par un "échec" car l'objectif de réduction ne s'est pas accompagné d'une réflexion sur les modèles de production, remarque Stéphane Le Foll.
Cette fois, le gouvernement entend appliquer une méthode systémique. Le ministre, chantre de l'agroécologie, veut vulgariser de nouveaux modèles de production plus économes en intrants, comme la rotation des cultures qui permet de lutter contre l'érosion des sols et les maladies.
Il souhaite également développer les alternatives naturelles aux pesticides, comme le "biocontrôle (méthode naturelle de protection, ndlr) et encourager l'innovation autour des machines agricoles" (services cartographiques par drones, GPS, pulvérisateurs de précision) pour optimiser l'utilisation des pesticides.
Le ministre compte également s'appuyer sur les fermes pionnières du réseau Dephy, qui sont aujourd'hui environ 2.000. Il en faudrait 1.000 de plus selon lui, pour convaincre d'autres exploitations.
Car les pionnières ont déjà obtenu des résultats concluants, puisqu'elle ont "vu l'utilisation des pesticides baisser en moyenne de 12% en 2013", une performance notable quand on sait qu'en moyenne l'usage des pesticides a à l'inverse bondi de 9% sur l'année, en partie en raison des conditions météo.
Par ailleurs, le nouveau plan ouvre la voie à un système de pénalités financières: dans un premier temps et de façon expérimentale ils viseront les distributeurs, via des "certificats d?économie de produits phytosanitaires [CEPP]", qui devront parvenir à "baisser de 20% le nombre de doses utilisées sur cinq ans".
"Au lieu de vendre un produit, ceux-ci seront incités à vendre plus de services, c'est-à-dire apprendre aux agriculteurs à utiliser la juste quantité ou des techniques alternatives".
Et s'ils ne parviennent pas à "baisser de 20% le nombre de doses utilisées sur cinq ans", ils se verront infliger des pénalités sur leurs marges.
La plupart des propositions reprennent celles du député socialiste de Meurthe-et-Moselle Dominique Potier, lui-même agriculteur, qui a remis au gouvernement un rapport en décembre.
Ce plan, qui doit être publié en juin pour une application dés le second semestre 2015, sera doté d'une enveloppe augmentée à 70 millions d'euros, contre 40 actuellement.
- Faire son 'auto-critique' -
Les industriels de l'agrochimie n'ont pas manqué de réagir, rejetant tout objectif de réduction chiffré. "L'objectif pour nous est de réduire les impacts (sur l'eau, sur la santé), pas les quantités", a indiqué à l'AFP Eugénia Pommaret, directrice générale de l'Union des industries de la protection des plantes (UIPP).
Les agriculteurs eux ont reçu diversement ces annonces. Xavier Beulin, président de la puissante FNSEA, a reconnu que le secteur devait faire son "auto-critique", mais il a appelé, comme d'habitude, à replacer la réflexion dans un contexte de concurrence européenne. La Coordination rurale, syndicat minoritaire, s'est inquiétée des répercussions des pénalités financières des distributeurs sur les agriculteurs. Cela va "inciter les distributeurs de phytosanitaires à venir racler les poches des agriculteurs déjà vides".
La Confédération paysanne, syndicat agricole minoritaire proche des écologistes, salue elle "l'intention" mais regrette le manque de "cohérence" de politiques qui vantent à la fois, selon elle, l'agroécologie et l'industrialisation de l'agriculture.
L'ONG Générations futures qui milite contre les pesticides, estime que ces propositions ne permettront une réduction qu'"à la marge", tout en maintenant "l'agriculteur dans un système dépendant aux pesticides".
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