Juliette Greco, 87 ans, icône de la chanson française, muse de l'existentialisme et du Saint-Germain-des Prés d'après-guerre, a annoncé jeudi qu'elle quittera la scène après une dernière tournée en avril.
"C'est très dur, c'est très compliqué pour moi, c'est très douloureux: il faut savoir partir joliment", a dit sur RTL l'interprète de "Déshabillez-moi", une de ses plus célèbres chansons.
"Ce qui me pousse, c'est que le temps passe et que je vais entamer ma dernière tournée", a-t-elle ajouté d'une voix émue.
"Quand je suis sur scène je ne suis pas fatiguée du tout", a poursuivi Juliette Greco, qui s'exprimait au téléphone depuis son lieu de résidence à Ramatuelle (Var).
"Je vais avoir 88 ans dans dix jours, je ne voudrais pas donner le spectacle d'une vieille femme qui s'accroche, je ne voudrais pas avoir honte, aller trop loin", a-t-elle dit.
Elle lancera "Merci", sa tournée d'adieux, le 24 avril au Printemps de Bourges, où elle n'était pas venue depuis 2007.
A la fin des années 1940, Raymond Queneau et Jean-Paul Sartre signent les premiers succès de Juliette Greco au cabaret "Le Tabou" : "Si tu t'imagines" et "La Rue des Blancs-Manteaux".
Elle chantera aussi Pierre Desnos, Jacques Prévert, Bertolt Brecht, Boris Vian, Françoise Sagan, Charles Aznavour ("Je hais les dimanches", Grand prix de la Sacem 1951), Léo Ferré ("Jolie môme"), Guy Béart ("Qu'on est bien", "Il n'y a plus d'après"), Serge Gainsbourg ("la Javanaise", "l'Accordéon"), Georges Brassens.
Après d'autres cabarets mythiques ("La Rose rouge", "Le Boeuf sur le toit"), c'est la consécration à l'Olympia en 1954 puis à New York. Juliette Greco devient alors un symbole de la chanson française à travers le monde.
Aux Etats-Unis, son compagnon, le producteur américain Darryl Zanuck, la fait jouer dans "Bonjour tristesse", d'Otto Preminger (1958), "Les Racines du ciel", de John Huston (1958), "Drame dans un miroir", de Richard Fleischer (1960).
Revenue à Paris, elle se consacre à la chanson. "Déshabillez-moi", un de ses plus grands succès, est enregistré en 1968.
- Elle nargue la dictature chilienne -
Célèbre pour son interprétation de Belphégor en 1965, dans le feuilleton télévisé éponyme, la chanteuse de la Rive gauche était apparue sur les planches dès 1945 dans "Victor ou les enfants du pouvoir" et au cinéma, en 1949, dans "Orphée", de Jean Cocteau.
Née le 7 février 1927 à Montpellier, elle est élevée très jeune par ses grands-parents, à Bordeaux, après la séparation de ses parents.
Dans son autobiographie "Jujube" (1983, Stock), son surnom d'enfance, elle raconte comment, après l'arrestation de sa mère, résistante, elle est incarcérée une dizaine de jours à Fresnes en 1943 avec sa soeur aînée. Sa mère et sa soeur seront déportées à Ravensbrück mais en réchapperont.
Ce drame en fera une femme libre et engagée qui, en 1981, lors d'un spectacle au Chili devant des notables du régime d'Augusto Pinochet, n'interprètera que des chansons interdites. Elle sera reconduite à l'aéroport manu militari dès l'issue du concert.
La gloire ne la quitte pas et, en 2004, un an après son album ("Aimez-vous les uns les autres") et 50 ans après son premier passage, elle retrouve l'Olympia.
En juillet 2005, elle est l'invitée d'honneur des Francofolies à La Rochelle et, en février 2007, pour son 80e anniversaire, elle retrouve son public au Théâtre du Châtelet à Paris. En août 2013, à 86 ans, elle chante encore au Festival de Ramatuelle.
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