Dix prêtres et deux laïcs sont poursuivis en Espagne pour leur implication dans une affaire de pédophilie dont le Pape s'était inquiété après avoir été alerté par une victime, le plus grave scandale de cette nature à toucher l'Eglise espagnole.
L'image, rare, avait marqué l'Espagne: allongé face contre le sol froid de la cathédrale de Grenade (sud), en compagnie de huit autres prêtres, l'archevêque de la ville Francisco Javier Martinez a demandé pardon, le 23 novembre "pour toutes les fautes" commises dans cette affaire.
Elle avait éclaté suite à une lettre de D, 24 ans, au pape François, dénonçant les abus sexuels dont il se disait victime, "afin d'éviter que qu'ils puissent être commis contre d'autres personnes", selon son avocat.
Le pape a lui-même raconté à des journalistes, le 25 novembre, "sa très grande douleur" lorsqu'il a pris connaissance de ces sévices.
"Quand j'ai lu cela, je l'ai appelé et lui ai dit: va chez l'évêque. J'ai écrit à l'évêque pour qu'il lance une enquête, pour aller de l'avant", a-t-il déclaré. "C'est une très grande douleur, mais la vérité est la vérité et nous ne devons pas la cacher".
Le 14 octobre 2014, près de dix ans après le début de son calvaire de trois ans, l'ancien enfant de coeur encore très attaché à l'Eglise a donc déposé une plainte auprès du parquet de Grenade, nichée au pied de la Sierra Nevada, en Andalousie.
Il y exposait des abus sexuels de la part d'un groupe de prêtres du diocèse entre 2004, alors qu'il avait 14 ans, et 2007.
- Villa avec piscine
La victime, un jeune homme se présentant comme membre de l'Opus Dei et qui eu 25 ans en janvier, a subi des sévices et des viols de la part de l'auteur principal, son curé, avec la participation ou la complicité des autres mis en examen. Ils se réunissaient dans une villa avec piscine à Grenade.
L'ordonnance du juge détaille des sévices de plus en plus graves.
Le curé de la paroisse qu'il fréquentait depuis l'âge de sept ans, manipulant sa ferveur religieuse, lui promettait un bel avenir de prêtre et le culpabilisait lorsqu'il tentait de refuser ses avances, selon l'ordonnance rendue par le juge en charge de l'affaire.
Au moins deux autres membres du groupe, tous amateurs de parties fines et de films pornographiques, l'auraient aussi touché, et les autres étaient au courant des activités du curé n'hésitant pas à le menacer verbalement d'exclusion du "groupe" pour son manque d'enthousiasme.
Les 12 mis en examen sont poursuivis pour participation directe aux abus ou complicité, pour n'avoir rien fait pour les empêcher.
Depuis, au moins une autre personne, âgée de 44 ans aujourd'hui, a évoqué une tentative d'agression sexuelle remontant à 1991, faisant craindre que le réseau existait depuis longtemps avec d'autres victimes à son actif.
"Si l'on prend en compte le nombre de mis en cause et le système d'abus, ils formaient une sorte de secte au sein même de l'Eglise", considère Jose Manuel Vidal, directeur du site internet Religion digital, qui avait révélé l'affaire. Ce serait le cas le plus grave connu en Espagne.
"Ce n'est pas un prédateur qui agit de manière isolée, ceux-là sont difficiles à détecter, c'est un groupe organisé, ayant des moyens financiers, du pouvoir", a-t-il ajouté.
Depuis son élection en mars 2013, le pape François prône la tolérance zéro contre la pédophilie, fléau qui pourrait avoir fait des dizaines de milliers de victimes et a fortement discrédité l'Église catholique depuis les années 90.
Dès l'ouverture d'une enquête préliminaire, l'archevêché avait annoncé "avoir pris des mesures de précaution en retirant de l'exercice ministériel les prêtres directement accusés des abus".
Depuis Londres, l'association de victimes d'abus sexuels de prêtres SNAP a cependant estimé que c'était insuffisant, exigeant mercredi du Pape qu'il démette de ses fonctions l'archevêque de Grenade.
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