Dieu se cache, pour que nous soyons à son image, et que la liberté et l'amour puissent nous habiter. Et quelle cachette il a trouvée ! Il se cache dans une étable, sous les traits d'un enfant. Aux antipodes de la toute-puissance et du Ciel, semble-t-il... C'est justement la raison pour laquelle les exégètes distingués n'ont pas su le trouver. Ils savaient pourtant fort bien que le Messie naîtrait à Bethléem, dans la ville de David, qu'il serait porteur dans l'éclat glorieux du nom de Dieu et qu'il enverrait des bergers, comme est écrit et annoncé le mystère de la Nuit sainte chez le prophète Michée. Ils connaissaient les écrits, la littérature et les problèmes qu'elle pose, ses potentialités, ses affirmations. Mais cela restait de la littérature. Ces grands théologiens s'attachaient à la lettre et ne trouvaient pas d'eux-mêmes accès à la réalité. Il ne vint pas à l'idée d'Hérode que cet enfant pouvait être Dieu. Tout au plus pouvait-il imaginer un Dieu qui soit un maître dominateur encore plus cruel et plus puissant que lui-même. Cet enfant pouvait être un rival potentiel, qu'il fallait éliminer. Aucun d'eux ne trouva Dieu dans sa cachette. Et nous, avec notre snobisme, notre présomption, notre esprit éclairé, le trouvons-nous, à vrai dire? Le cherchons-nous, d'ailleurs? Ou bien ne sommes-nous pas, comme cet impatient compagnon de jeu, partis depuis longtemps en ayant abandonné le jeu qui serait la vérité de notre vie? Et quel est l'homme éclairé qui s'inclinerait, adorerait et reconnaîtrait l'enfant comme le Dieu éternel descendu parmi nous? Il trouvera mille excuses, mille raisons de le nier.
Dieu se cache, parce qu'il veut que nous soyons à son image, que la liberté et l'amour adviennent en nous. Mais il n'est pas seulement caché. Noël est sa cachette, si l'on veut, mais c'est en même temps, avec Pâques, la plus grande manifestation de Dieu. Dieu ne nous laisse pas seuls dans ce jeu de la Vérité; il l'a lui-même inventé en y ménageant des ouvertures. Et Il ne cesse de nous poursuivre. Par la création, il nous parle sans cesse, si nous voulons bien entendre et voir, et nous dit: cherchez-moi donc ! Dans l'Histoire sainte d'Abraham, il nous a donné les règles et expliqué les signes nous permettant de le trouver. Il nous cherche, pour que nous soyons capables de le chercher. Il a descendu toute l'échelle des distances entre Lui et nous, jusqu'à notre condition humaine, jusqu'à se faire petit enfant. J'ai envie de dire qu'il est sorti de sa cachette et qu'il nous court littéralement après, pour que nous ne cessions pas de le chercher, et soyons capables de Le trouver. Il se rend visible sous les traits de l'enfant, tel qu'il est, c'est-à-dire cet amour capable de faire quelque chose d'aussi énorme, qui prend le temps d'être lui-même un homme. Il est visible comme cette liberté capable d'un tel acte. D'une toute-puissance capable de nous poursuivre. Or, nous avons une toute autre idée de la toute-puissance ! [...]
« Transeamus usque Bethlehem »: partons à Bethléem, se dirent les bergers. « Transeamus usque Bethlehem »: l'Église veut murmurer et chanter cette exhortation à nos coeurs. Elle veut nous inviter à partir, à nous mettre en route. C'est nécessaire pour trouver Dieu : traverser, aller de l'autre bord, un passage; car Dieu est le Tout-Autre. Nous vivons si souvent en nous détournant de Lui. Nos pensées et nos projets nous détournent de Lui. Nous vivons de notre côté, dans une autre direction que la sienne; c'est pourquoi Il est caché à nos yeux. Si nous voulons Le trouver, nous devons aller de l'autre bord, franchir la route des contradictions intimes et trouver la voie des métamorphoses, jusqu'à ce que nos yeux le voient et nos oreilles l'entendent. Pour rencontrer Dieu, dit saint Paul à la suite de l'Ancien Testament, il te faut traverser l'océan; et il poursuit – il n'est pas nécessaire que tu montes au ciel ou descendes aux enfers (cf. Rm 10, 5-8; Dt 30, 11-14). Tout cela, nous le pouvons aujourd'hui, et nous le faisons, hélas, non pas pour chercher Dieu, mais plutôt pour lui échapper. « Dieu, nous dit saint Paul, est tout proche. Il est sur tes lèvres et dans ton c½ur » (Rm 10, 8-10); (Dt 30, 14). Nous avons besoin de cette proximité. Nous devons Le chercher tout près de nous, pour trouver la cachette qu'est sa Révélation. Et cette Nuit doit nous y encourager.
« Transeamus usque Bethlehem »: se mettre en route vers le Tout proche, au centre de notre être, dans la vérité de Dieu qui attend en nous et qui veut naître en nous. Il nous faut cheminer vers cette simplicité du coeur, capable de Le percevoir.
« Transeamus usque Bethlehem ! » Demandons au Seigneur qu'Il nous bouscule, comme il l'a fait avec les bergers. Qu'il nous rende capables de nous mettre en route, de faire la traversée, pour que nous aussi connaissions cette grande Joie destinée à tout son peuple: «Voyez, il vous est né un Sauveur dans la cité de David, le Christ, le Seigneur!»
Amen!
Benoît XVI
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