Le nouveau Premier ministre grec Alexis Tsipras doit dévoiler mardi la composition de son gouvernement dont la priorité sera de renégocier la dette du pays avec ses créanciers internationaux, et d'améliorer le quotidien des Grecs en renversant le cours de l'austérité.
En première ligne de la confrontation prévisible avec les bailleurs de fonds, UE et FMI, le ministère-clé de Finances pourrait être attribué à l'universitaire polyglotte Yannis Varoufakis, pourfendeur de "la dette odieuse" et partisan de la "fin des mesures d'austérité", qui ont provoqué "une crise humanitaire".
Ce professeur d'économie de 53 ans, étiqueté comme un des "radicaux" de Syriza, dont il s'est rapproché récemment, devrait être supervisé par Yannis Dragassakis, 68 ans, un économiste plus modéré et cadre du parti, chargé de coordonner les portefeuilles des Finances, du Tourisme, de la Marine marchande et des Infrastructures.
Signe de l'impatience de Bruxelles à rencontrer le nouveau gouvernement grec, Jeroen Dijsselbloem, le président de l'Eurogroupe, s'est déjà entretenu lundi au téléphone pendant quinze minutes avec Yannis Varoufakis, à l'issue d'une réunion des ministres des Finances de la zone euro (Eurogroupe). Il se rendra d'ailleurs dès vendredi à Athènes.
Tout en avertissant que "les problèmes de la Grèce sont toujours là" et "qu'ils attendent des solutions", Jeroen Dijsselbloem s'est dit prêt à "attendre de connaître la position du nouveau gouvernement" d'Alexis Tsipras "concernant l'avenir du programme".
L'UE a fixé à la Grèce la limite de fin février pour accomplir certaines réformes nécessaires au déblocage de quelque sept milliards d'euros d'aide, un délai dont M. Tsipras devra décider s'il sera prolongé ou non.
Alexis Tsipras a indiqué dimanche après sa victoire aux législatives anticipées que l'austérité était du passé, assurant cependant qu'il était disposé à négocier une solution "bénéficiant à tous".
- Etrange alliance -
Le patron de l'Eurogroupe s'est félicité du fait que Syriza ait "pour ambition de rester dans la zone euro. C'est la base à partir de laquelle nous allons travailler".
"S'il y a une bonne volonté des deux parties, la solution sera trouvée", avait indiqué à l'AFP Yannis Dragassakis quelques jours avant la victoire de Syriza.
"La restructuration de la dette est l'un des facteurs qui contribuerait à la reprise, l'autre, c'est la nécessité de réaliser des réformes", avait-il insisté.
Syriza souhaite l'organisation d'une conférence européenne sur la dette, pas seulement celle de la Grèce, sur le modèle de celle qui, à Londres en 1953, a conduit à l'effacement de l'essentiel de la dette de l'Allemagne, sortie ruinée de la Seconde guerre mondiale.
La question de la restructuration de la dette divise les Européens alors que la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) Christine Lagarde ne rejette pas complètement l'idée d'une telle conférence.
Sur le front intérieur, la priorité du gouvernement sera de consacrer 1,2 milliard d'euros à lutter contre "l'exclusion sociale", subie par des dizaines de milliers de Grecs après six ans d'austérité drastique, de rétablir le salaire minimum de 580 à 751 euros, de supprimer certains impôts et de lutter "contre le clientélisme" et "la corruption".
Ces mesures provoquent des frissons en Europe et surtout en Allemagne, tenant de la rigueur budgétaire, qui craint un relâchement budgétaire des autres pays européens.
Le nouveau gouvernement d'Alexis Tsipras devra également trouver un équilibre avec son encombrant allié, le parti souverainiste des Grecs Indépendants (Anel), dont le président Panos Kammenos est pressenti pour le ministère de la Défense, selon la presse grecque.
Ayant obtenu 149 sièges sur les 300 du Parlement, Alexis Tsipras a été contraint de chercher des soutiens pour constituer une majorité au Parlement. Avec les 13 sièges de Panos Kammenos, cette majorité sera confortable pour la gauche qui reste "ouverte à d'autres alliances", a indiqué une source proche de Syriza.
L'alliance avec les Grecs indépendants laisse cependant dubitatifs de nombreux analystes qui la qualifient de "contre nature" car si les deux partis ont pour dénominateur commun la fin de l'austérité et la "souveraineté" économique, leurs positions sur les questions de société sont très éloignées.
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