L'horloge de l'apocalypse, qui symbolise l'imminence d'un cataclysme planétaire, a été avancée de deux minutes, à minuit moins trois, ont annoncé jeudi des scientifiques internationaux citant la double menace du réchauffement climatique et le regain de tensions nucléaires.
Le Bulletin des scientifiques atomiques, une association qui compte dans ses rangs 18 prix Nobel, juge ainsi "très élevée la probabilité de catastrophe planétaire à moins que des mesures ne soient prises rapidement".
La célèbre horloge indique maintenant minuit moins trois minutes, précise Kennette Benedict, présidente de cette association qui a créé en 1947 cette horloge symbolisant au départ l'imminence d'un cataclysme nucléaire.
"Aujourd'hui, le réchauffement climatique incontrôlé et une course aux armes nucléaires résultant de la modernisation des énormes arsenaux existant représentent des menaces extraordinaires et indéniables à la survie de l'humanité", a estimé Kennette Benedict en annonçant cette décision lors d'une présentation à Washington.
"Les dirigeants mondiaux n'ont pas agi avec la promptitude et l'ampleur requises pour protéger les citoyens de catastrophes potentielles", a-t-elle ajouté pour justifier le déplacement de l'aiguille de la pendule.
La dernière fois que l'aiguille avait été déplacée remonte au 10 janvier 2012, quand elle avait été avancée d'une minute.
Elle n'a jamais été aussi près de minuit depuis 1984, quand elle avait également été réglée à 23H57 au moment le plus tendu des relations américano-soviétiques.
Sur le front du climat l'absence d'action ces dernières années face à la forte opposition politique a empiré la situation, déplore Sivan Kartha, un membre du bureau scientifique du Bulletin of the Atomic Scientists et un des responsables du Stockholm Environment Institute.
"Les gaz à effet de serre dans le monde se sont accru de 50% depuis 1990 et ces émissions ont augmenté plus rapidement depuis 2000 que durant les trois décennies précédentes combinées", précise-t-il.
- Civilisation humaine -
Selon lui, les investissements consacrés aux infrastructures d'exploitation des énergies fossiles ont dépassé mille milliards par an, sans compter des centaines de milliards de dollars de subventions publiques. "Nous devons et pouvons inverser cette tendance", insiste le scientifique.
Pour Richard Somerville, professeur et chercheur retraité du Scripps Institution of Oceanography à l'Université de Californie, "les efforts entrepris pour réduire les gaz à effet de serre ont été très insuffisants pour éviter des perturbations climatiques".
"Sans des réductions beaucoup plus importantes de ces gaz, le monde émettra suffisamment de dioxyde de carbone (CO2) d'ici la fin de ce siècle pour bouleverser profondément le climat terrestre", prévient-il.
"Ce changement climatique affectera des millions de personnes et menacera un grand nombre d'écosystèmes dont dépend la civilisation humaine", poursuit le professeur Somerville, pressant "les dirigeants du monde d'agir de façon coordonnée et rapidement pour réduire drastiquement surtout les émissions de CO2".
Quant aux tensions nucléaires, l'optimisme prudent qui prévalait avec la fin de la Guerre Froide s'est évaporé, juge Sharon Squassoni, directeur du programme de prévention de la prolifération des armes nucléaires au Center for Strategic and International Studies, un institut de recherche de Washington.
Bien que les Etats-Unis et la Russie ne détiennent plus les dizaines de milliers d'armes nucléaires qu'ils avaient durant la Guerre Froide, le rythme de réduction de ces arsenaux s'est fortement ralenti ces dernières années, et ce bien avant la crise en Ukraine.
De 2009 à 2013, l'administration du président Barack Obama n'a éliminé que 309 têtes nucléaires, relève Sharon Squassoni.
Un conflit nucléaire même limité provoquerait un grand nombre de morts et aurait des effets très néfastes sur l'environnement, selon elle.
Ces scientifiques pressent également les responsables politiques de trouver dès maintenant une solution durable au problème du stockage des déchets nucléaires des centrales.
Depuis sa création en 1947, l'horloge de l'apocalypse a été ajustée 18 fois, de minuit moins deux en 1953, quand les Etats-Unis ont décidé de produire la bombe à hydrogène, à minuit moins 17 minutes en 1991, à la fin de la Guerre Froide.
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