Huit jours après l'attaque qui a décimé sa rédaction, Charlie Hebdo, toujours très demandé en kiosques, a enterré jeudi ses dessinateurs Wolinski et Tignous, figures du journal, et trois autres victimes, tandis que François Hollande prononçait des paroles d'apaisement à l'adresse des musulmans de France.
De nombreuses personnalités du monde culturel et politique, ainsi que des dizaines d'anonymes se sont rassemblés jeudi au cimetière du Père-Lachaise pour l'inhumation de Georges Wolinski, au lendemain des funérailles de son ami Cabu, le père du "beauf".
Dessinateur mythique pour toute une génération, père du célèbre "Roi des cons", Wolinski avait été le pilier du journal "bête et méchant" Hara-Kiri dans les années 60, puis de Charlie Hebdo.
L'un des derniers dessins de Wolinski, resté sur son plan de travail, était exposé dans la salle attenante au crématorium où son cercueil a été apporté au son du jazzman Miles Davis.
La foule était aussi venue nombreuse à la cérémonie pour le dessinateur Tignous à la mairie de Montreuil, où ses amis ont recouvert de dessins son cercueil de bois clair, ainsi qu'aux obsèques de Franck Brinsolaro, le policier qui assurait la protection du dessinateur Charb, et de la psychiatre Elsa Cayat, chroniqueuse à Charlie Hebdo. L'économiste Bernard Maris devait également être inhumé dans la journée.
Vendredi, la sombre litanie se poursuivra avec les obsèques de Charb, du dessinateur Honoré et de Mustapha Ourrad, le correcteur de Charlie Hebdo.
A Paris, François Hollande a adressé aux musulmans de France des paroles apaisantes, lors d'une visite très symbolique à l'Institut du Monde arabe (IMA) à Paris.
"Je veux que ceux (les musulmans) qui vivent en France puissent se savoir, unis protégés, respectés comme eux-mêmes doivent respecter la République", a-t-il déclaré. Les musulmans sont les "premières victimes du fanatisme, du fondamentalisme, de l'intolérance" sur la planète.
Il a évoqué la photo d'une journaliste syrienne brandissant dans les décombres d'Alep une pancarte "Je suis Charlie", le slogan des manifestations contre les attentats en France qui ont fait 17 morts, dont 12 à Charlie Hebdo.
L'Allemagne et les Etats-Unis ont à nouveau manifesté leur soutien à la France : la chancelière allemande Angela Merkel a rendu hommage aux victimes devant les députés du Bundestag, en promettant de combattre les idéologues du terrorisme. Le secrétaire d'Etat américain John Kerry a annoncé une visite à Paris jeudi soir et vendredi pour "donner une grande accolade à la France" après les attentats de la semaine dernière.
- Les ventes massives continuent -
Les Français ont, eux, continué à manifester leur solidarité avec le journal en se précipitant de nouveau dans les kiosques jeudi pour se procurer le dernier Charlie Hebdo, avec Mahomet en Une, et beaucoup de marchands se sont très vite retrouvés, comme la veille, en rupture de stock.
A Paris, Lyon, Lille ou Paris, des magasins, dévalisés, affichaient la même pancarte: "Plus de Charlie!".
Mercredi, près d'un million d'exemplaires s'étaient écoulés en quelques heures. Le distributeur du journal, MLP, prévoit d'en livrer à nouveau un million par jour jeudi et vendredi, du jamais vu dans la presse française. Au total, le numéro sera imprimé à 5 millions d'exemplaires. 130.000 exemplaires devaient arriver dans une trentaine de pays d'ici jeudi soir.
Grâce aux dons qui affluent, aux recettes des ventes et aux aides promises par le gouvernement, le journal devrait recueillir plus de 10 millions d'euros. Une assurance-vie pour ce petit magazine sans le sou.
A l'étranger, la Une du dernier Charlie Hebdo, réalisé par les rescapés de l'attentat, continuait de susciter des remous dans le monde musulman. Al-Azhar, principale autorité de l'islam sunnite basée en Egypte, a appelé les musulmans à "ignorer" cette "frivolité haineuse".
En Afghanistan, les talibans ont déploré la publication de nouvelles caricatures et estimé que l'attaque contre Charlie Hebdo a "fait justice contre les auteurs de ces actes obscènes".
En Turquie, le Premier ministre Ahmet Davutoglu a aussi dénoncé la publication, jugeant que la liberté d'expression n'était pas "la liberté d'insulter". La justice turque a interdit la diffusion sur internet de la caricature du prophète, qu'a cependant reproduite dans sa version papier le quotidien Cumhuriyet, seul journal d'un pays musulman à la publier.
Deux pays ont pris officiellement position contre le journal : le Sénégal, qui a interdit la diffusion de Charlie Hebdo et du quotidien Libération, et l'Iran, qui a qualifié la couverture de l'hebdomadaire d'"insultante", tout en condamnant le terrorisme.
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