Les autorités cubaines ont relâché ces derniers jours 53 prisonniers politiques dont la remise en liberté était exigée par Washington dans le cadre du rapprochement diplomatique historique amorcé entre les deux pays.
Le département d'Etat a révélé à la presse lundi matin que le gouvernement cubain avait "notifié" aux Etats-Unis avoir "bouclé la remise en liberté des 53 prisonniers politiques qu'il s'était engagé à libérer".
"Nous saluons cette nouvelle très positive et sommes satisfaits que le gouvernement cubain ait respecté son engagement", s'est félicitée la porte-parole de la diplomatie américaine Marie Harf, refusant cependant de dévoiler l'identité des personnes libérées.
Mais elle a précisé que son gouvernement avait transmis la liste des noms au Congrès, aux commissions des Affaires étrangères du Sénat et de la Chambre des représentants. L'un des sénateurs, le démocrate Patrick Leahy, a immédiatement rendu publique auprès de journalistes cette liste qui ne comprend aucun dissident de premier plan.
A La Havane, la dissidence s'est félicitée de ces libérations, et la Commission cubaine des droits de l'Homme (CCDH), organisation interdite mais tolérée par les autorités, a indiqué à l'AFP qu'une soixantaine de prisonniers politiques demeuraient incarcérés à Cuba.
Son président Elizardo Sanchez a précisé que 38 personnes avaient été libérées ces derniers jours, et que les 15 autres avaient été libérés auparavant, dont certains avant même l'annonce de la normalisation entre les deux pays le 17 décembre.
De leur côté, le gouvernement cubain et les médias d'État gardaient encore une fois le silence sur le sujet.
Ces prisonniers figuraient sur une liste que les Etats-Unis avaient soumise à Cuba au mois de juillet. "Aucun des 53 n'avait été libéré avant que nous ne bouclions cette liste en juillet", a précisé un diplomate américain.
Selon la CCDH, la grande majorité de ces prisonniers avaient été arrêtés lors de manifestations ou réunions illégales ou pour avoir exprimé leur opposition au gouvernement.
L'un des représentants de la dissidence, Manuel Cuesta Morua, a salué des "libérations, survenues en un temps record, (qui) me semblent constituer un pas positif".
Il y a vu "l'indication que le gouvernement cubain est sérieusement engagé dans la normalisation de ses relations avec les États-Unis () et qu'il semble comprendre que ce processus passe par le dossier des droits de l'homme" soulevé régulièrement par les Américains.
- Normalisation des relations -
L?Église catholique cubaine, qui s'est imposée comme l'unique interlocuteur politique du régime communiste en l'absence de toute opposition légale, s'est aussi félicitée de ces libérations tout en restant prudente.
"Cela fait toujours plaisir, mais il faudra attendre que tout cela se confirme officiellement", a déclaré à l'AFP Orlando Marquez, porte-parole de l'archevêché.
"En cas de confirmation, cela indique que le processus de négociation () est déjà en marche et cela illustre la volonté manifeste des deux gouvernements () d'avancer vers une normalisation de leurs relations qui sera bénéfique pour tous", a-t-il poursuivi.
Cette percée sur le dossier épineux des prisonniers politiques survient après que Washington eut exprimé sa "profonde inquiétude" lors de l'arrestation le 30 décembre d'une cinquantaine de dissidents. Les forces de l'ordre cubaines souhaitaient visiblement empêcher la tenue d'une tribune publique que projetait d'organiser à La Havane l'artiste Tania Bruguera. Tous avaient été libérés au bout de quelques heures ou le lendemain, y compris Mme Bruguera, selon la CCDH.
Les libérations surviennent aussi trois semaines après l'annonce historique, par les présidents américain et cubain, Barack Obama et Raul Castro, d'une amorce de dégel. Les deux pays n'ont plus de relations diplomatiques depuis plus d'un demi-siècle et Washington impose un embargo commercial à l'île communiste.
Après 18 mois de négociations secrètes, sous l'égide du Vatican et du Canada, les Etats-Unis avaient accepté mi-décembre de libérer trois espions cubains écroués depuis la fin des années 1990 aux États-Unis. De son côté, La Havane avait consenti à relâcher un agent cubain à la solde de Washington ainsi que l'Américain Alan Gross, emprisonné depuis cinq ans à Cuba, ainsi que les 53 prisonniers politiques.
Les deux pays vont maintenant pouvoir discuter officiellement d'une reprise de leurs relations diplomatiques, avec la réouverture d'ambassades, même s'ils entretiennent depuis 1977 des sections d'intérêts.
Les premiers entretiens officiels bilatéraux auront lieu les 21 et 22 janvier à La Havane, pilotés côté américain par la secrétaire d'État adjointe pour l'Amérique latine Roberta Jacobson.
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