L'émotion était forte dimanche après le refus du maire de Champlan (Essonne) d'inhumer dans le cimetière de sa ville un bébé rom décédé au lendemain de Noël, certains envisageant de porter l'affaire devant la justice.
Le Défenseur des droits, Jacques Toubon, s'est dit "bouleversé, stupéfait par la nouvelle", ajoutant sur France Inter qu'il allait "peut-être agir", la question des "discriminations devant la mort" faisant partie selon lui des prérogatives de son institution.
La veille, nombre d'élus avaient déjà fait part de leur "honte" et la secrétaire d'État à la Famille, Laurence Rossignol, a jugé sur Twitter qu'on infligeait une "inhumaine humiliation" à la famille rom en lui refusant une "sépulture".
Pour le PCF, c'est une décision "humainement et moralement inacceptable". "Injustifiable et inhumain" également selon Marielle de Sarnez, vice-présidente du MoDem, invitée d?Europe 1 dimanche.
"Jusqu'où ira la stigmatisation anti-Roms?", s'est demandé dans un communiqué Roger-Gérard Schwartzenberg, président du groupe radical (RRDP) de l?Assemblée nationale, indigné que "l?on discrimine les membres d?une minorité () audelà de la mort d?un de ses enfants".
Prénommé Maria Francesca, le bébé, une petite fille de deux mois et demi, est décédé dans la nuit du 25 au 26 décembre d'une mort subite du nourrisson, selon l'association de solidarité en Essonne avec les familles roumaines et roms (ASEFRR), qui suit la famille depuis huit ans.
A la demande des parents, une entreprise de pompes funèbres de Corbeil-Essonnes a pris contact avec la municipalité pour obtenir l'autorisation d'inhumer le nourrisson dans le cimetière de Champlan, mais son maire a refusé.
"Nous avons peu de places disponibles", a simplement déclaré mercredi l'élu divers droite, selon des propos rapportés samedi par le Parisien. "Priorité est donnée à ceux qui paient leurs impôts locaux". Depuis, le maire, chevalier de la Légion d'honneur depuis 2012, ne s'est plus exprimé.
Selon Loïc Gandais, président de l'ASEFRR, l'édile a aussi "prétexté que la mort" du bébé "avait été déclarée à Corbeil-Essonnes". Pour lui, "c'est du racisme, de la xénophobie et de la stigmatisation".
- Enterrement lundi -
La petite fille sera finalement inhumée lundi à Wissous, près de Champlan. "Une mère qui a porté un enfant pendant neuf mois et qui le perd à deux mois et demi, ce n'est pas la peine d?aggraver sa douleur", a déclaré à l'AFP le maire UMP de Wissous, Richard Trinquier, invoquant un "souci d'humanité".
L'ASEFRR prendra en charge les frais d?obsèques, la famille ayant financé l'achat du cercueil.
Le président de la Licra Alain Jakubowicz a jugé samedi qu'il s'agissait de "racisme" et dit envisager des poursuites judiciaires. L'ASEFRR a, elle, précisé qu'elle ne comptait pas porter plainte. "Sur le plan moral, c'est absolument contestable, mais sur le plan juridique, on ne pourra pas faire grand-chose", a souligné M. Gandais.
Selon la loi, les proches d'un défunt doivent demander l'autorisation d'inhumation au maire de la commune du cimetière choisi. Il peut être inhumé dans la commune où il habitait, dans celle où il est mort, ou là où se trouve un caveau familial. Dans les autres cas, les maires peuvent s'opposer à l'inhumation.
Selon l'ASEFRR, les parents du bébé, qui ne souhaitent pas s'exprimer, ont l'un et l'autre environ 35 ans. Vivant depuis au moins huit ans en France, ils ont deux garçons de 5 et 9 ans, scolarisés à Champlan, et la mère a déjà perdu deux garçons en bas âge en Roumanie.
La famille vit à l'entrée de la commune, dans un bidonville clôturé, sans eau ni électricité, à proximité d'une petite usine, entouré par des voies rapides et des champs, quasiment au bout des pistes de l'aéroport d'Orly.
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