Le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian a effectué une visite surprise jeudi dans l'extrême nord du Niger, tout près des premiers sanctuaires jihadistes libyens, contre lesquels Paris tente de mobiliser la communauté internationale.
Venu de N'Djamena, la capitale tchadienne où il avait réveillonné mercredi avec des soldats français, M. Le Drian s'est posé à bord d'un avion de transport militaire sur une piste flambant neuve de la base française en cours d'installation à Madama, a constaté l'AFP.
Perdue dans un désert de sable à une centaine de kilomètres au sud de la frontière libyenne, cette base va constituer le futur poste avancé de l'opération anti-islamiste Barkhane aux portes de la Libye.
L'ancien fort colonial de Madama se trouve sur la route des combattants jihadistes et des trafiquants d'armes qui descendent des sanctuaires du sud de la Libye vers le nord du Mali et du Niger. Il offre donc une position hautement stratégique face au défi jihadiste libyen, contre lequel la France ne cesse de tirer la sonnette d'alarme.
Dans son allocution de Nouvel An mercredi soir, Jean-Yves Le Drian a une nouvelle fois appelé la communauté internationale à se "mobiliser" pour endiguer le développement d'un "sanctuaire terroriste" en Libye qui déstabiliserait toute la région et menacerait l'Europe.
"La solution doit autant que possible être trouvée par les Libyens eux-mêmes. Mais c'est la responsabilité des voisins de la Libye et de la commnauté internationale que de se tenir à leurs côtés pour retrouver les chemins de la stabilité", a déclaré le ministre.
"La France y prendra évidemment toute sa part", a-t-il souligné, laissant la porte ouverte à tous les scénarios, politique et militaire, alors que plusieurs pays de la région, dont le Niger et le Tchad, réclament une intervention militaire internationale afin de stopper la contagion jihadiste vers le sud.
La base de Madama, qui doit être achevée au printemps, permettra à la force française Barkhane de disposer d'un point d'appui complémentaire, équivalent à celui de Tessalit dans le nord du Mali, dans le cadre de ses opérations de lutte contre les groupes armés au Sahel.
"Le centre de gravité de Barkhane, initialement axé sur Bamako (avec l'opération Serval), se déplace ainsi vers le nord", a relevé à N'Djamena le colonel français Denis Mistral.
- Le 'pays qui rend fou' -
L'opération Barkhane, mise en place le 1er août 2014 pour traquer les groupes islamo-mafieux au-delà des frontières, s'étend sur une zone couvrant cinq pays (Mauritanie, Mali, Niger, Tchad et Burkina Faso), à l'étendue aussi vaste que l'Europe de Gilbraltar à Moscou.
Madama se trouve en outre tout près du plateau de Djado, qui attise toutes les convoitises, notamment de trafiquants et jihadistes à la recherche de fonds, depuis la découverte de gisements d'or dans ses sous-sols. "Un pick-up coûte un kilo d'or", relève le colonel Mistral.
La construction de la base de Madama, commencée en novembre, représente un défi logistique dans cette région des extrêmes, située à 10 jours de piste de Niamey, la capitale du Niger. La zone est balayée par les vents de sable et écrasée de chaleur, d'où son surnom de "pays qui rend fou".
Un effectif de 200 hommes est actuellement à l'oeuvre sur place pour aménager et sécuriser le site. Des unités du génie ont remis en service un ancien forage d'eau, installé l'électricité et travaillent activement à l'installation de capacités pour accueillir à terme jusqu'à 350 militaires et stationner des avions et des hélicoptères.
L'ennemi, tapi dans le désert, est souvent invisible, ce qui nécessite la mobilisation d'importants moyens de reconnaissance, y compris de drones américains et français, pour le localiser puis le "neutraliser" (capturer, blesser ou tuer, en jargon militaire français) lors d'opérations aéroportées.
En octobre 2014, les forces françaises ont ainsi intercepté dans le nord du Niger un convoi de trois tonnes d'armes à destination du Mali, parmi lesquels des systèmes anti-aériens SA-7 de conception russe, des canons de 23 mm et plusieurs centaines de roquettes antichar.
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