L'opposant numéro un au Kremlin Alexeï Navalny a appelé mardi ses partisans à descendre dans la rue pour "détruire" le régime du président Vladimir Poutine après la condamnation par la justice russe de son frère pour détournement de fonds.
Au terme d'une lecture inhabituellement rapide du jugement, un tribunal de Moscou a reconnu coupable d'escroquerie et condamné Alexeï Navalny à trois ans et demi de prison avec sursis, tandis que son petit frère Oleg, moins en vue, a écopé de la même peine, mais ferme.
La condamnation des frères Navalny est l'épilogue d'une année que la Russie de Vladimir Poutine a marquée de son empreinte, de l'annexion de la Crimée au conflit dans l'est de l'Ukraine sur fond de détérioration de ses relations avec les Occidentaux.
L'opposant a qualifié son frère d'"otage" des autorités russes. A la sortie du tribunal, il a appelé ses partisans à manifester et fustigé un pouvoir qui ne "cherche pas seulement à détruire les opposants" mais également "ses proches". "Ce régime ne mérite pas d'exister, il doit être détruit", a-t-il lancé.
Un appel à manifester circulait déjà sur les réseaux sociaux, notamment sur Facebook où plus de 17.000 personnes annonçaient participer à la manifestation prévue mardi à 19H00 locales (16H00 GMT) sur la place du Manège, au pied de la muraille du Kremlin.
Ces condamnations constituent d'autant plus une surprise que le parquet russe avait requis au départ une peine de huit ans de prison pour Oleg Navalny, moindre que celle requise contre l'opposant, dix ans de prison.
"De tous les jugements qui auraient pu être rendus, celui-ci était le plus lâche", a dénoncé l'opposant sur son compte Twitter.
"C'est la pire souffrance morale qui pouvait être infligée à Alexeï Navalny", a renchéri auprès de l'AFP son avocate, Olga Mikhaïlova, qui a qualifié le jugement "d'illégal". La défense d'Oleg Navalny a par ailleurs annoncé faire appel de la décision de la cour.
Le Kremlin s'est pour sa part refusé à tout commentaire.
- Combat politique -
A 38 ans, Alexeï Navalny est considéré comme le plus charismatique et le plus farouche opposant au président russe, même si sa popularité et son influence sont plus que limitées dans un pays où les médias indépendants et les partis d'opposition ont été réduits à peau de chagrin durant les quinze ans au pouvoir de Vladimir Poutine.
Accusé par ses détracteurs d'être soutenu par l'Occident, le blogueur aux accents nationalistes et pourfendeur de la corruption des élites russes, avocat de formation, était poursuivi avec son frère pour avoir escroqué une filiale russe de la société française de cosmétiques Yves Rocher en surfacturant leurs services alors qu'ils géraient une entreprise de transport.
Il était assigné à résidence depuis février.
L'entreprise française Yves Rocher avait déposé plainte, avant, finalement de la retirer, affirmant par la voix de Christian Melnik, directeur financier de sa filiale russe, n'avoir subi "aucun dommage" à la suite de sa collaboration en 2008 avec la société de transport des frères Navalny, Glavpodpiska. Ces derniers étaient accusés d'avoir détourné 27 millions de roubles (l'équivalent de 393.000 euros).
Dans un commentaire sur son site, l'opposant avait estimé à la veille du jugement, que son procès dépassait largement sa personne et qu'au fond, peu importait la décision.
"Dix ans, cinq ans, deux ans de prison ferme ? Une peine avec sursis ?", demandait-il. "Quelle différence cela fait-il ? Même si demain on me condamne à dix jours dans la suite +luxe+ d'un sanatorium avec cinq repas par jour, cela changera-t-il quelque chose pour vous ?"
- Manifestation prévue mardi soir -
La possibilité d'une peine de prison ferme prononcée contre le juriste, déjà sous le coup d'une peine de cinq ans avec sursis, avait immédiatement suscité des appels à manifester le jour du jugement, prévu alors le 15 janvier.
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