Après deux Saint-Sylvestre endeuillées par des accidents liés aux pétards et autres feux d'artifice, les autorités espèrent éviter cette année un nouveau drame en Alsace, où les campagnes de prévention se heurtent à une tradition toujours tenace.
"Je fais tout ce qu'il faut pour parvenir à un bilan de zéro mort cette année et j'espère qu'on y parviendra", martèle le préfet de région Stéphane Bouillon, dans un entretien à l'AFP.
Tous les ans, aux 12 coups de minuit, toute l'Alsace s'embrase d'un gigantesque concert de pétards et autres explosifs. Le plus souvent, cette tradition issue du monde germanique est bon enfant, mais depuis quelques années, les accidents ne sont plus rares. Deux personnes ont été tuées en 2012 et une l'an dernier. Et parmi les blessés - le plus souvent à un oeil ou une main - certains ont dû être amputés d'un ou plusieurs doigts.
"Je ne veux pas éradiquer les pétards, mais je suis sceptique par rapport à une tradition qui fait chaque année une quinzaine de blessés avec des séquelles durables", souligne M. Bouillon.
Pour endiguer le phénomène, les autorités ont édicté une réglementation drastique. Seuls les plus petits pétards (dits de type C1 ou K1) sont autorisés. Les mortiers (sortes de fusées lancées depuis des pas de tir) sont notamment prohibés.
Les fêtards qui tenteraient de contourner l'interdiction en s'approvisionnant en Allemagne voisine - où les règles sont plus souples - risquent de se voir confisquer leurs achats à la frontière. Et les commerçants qui vendraient en Alsace des pétards interdits risquent une forte amende.
Les autorités contrôlaient à partir de lundi les emplettes des automobilistes français de retour d'Allemagne, notamment à Strasbourg, sur un pont enjambant le Rhin, a constaté un journaliste de l'AFP.
Bruna, une mère de famille dont les pétards et fusées ont été confisqués par la police, ne cachait pas son dépit: "J'ai dépensé 42 euros pour rien. En plus, ce ne sont pas mes enfants qui allaient les allumer mais leur père, qui est pompier", a-t-elle souligné.
"Ce ne sont pas les parents qu'il faut arrêter mais les mineurs qui achètent des pétards, ce sont eux qui sont dangereux", a-t-elle estimé.
L'an dernier, une tonne de pétards et fusées illégaux avait été saisie par la police et la gendarmerie en Alsace.
La nuit du Nouvel An, la police multipliera aussi les contrôles dans les rues pour saisir les explosifs jugés trop puissants.
- 'Des accidents idiots' -
Les autorités ont également mis l'accent sur la prévention : tous les élèves de 4e ont reçu la visite de policiers ou de gendarmes venus les sensibiliser aux dangers de cette tradition.
Pour le chirurgien de la main Philippe Liverneaux, habituellement en première ligne lors des nuits de réveillon, "les vrais problèmes commencent avec les collégiens, car c'est à partir de cet âge qu'ils allument des pétards tout seuls".
"Le message qu'on a du mal à faire passer, c'est qu'il ne faut pas allumer un pétard dans la main. Il faut le mettre sur un support, même si c'est moins marrant", insiste le chirurgien, qui dirige le service "SOS Mains" à Illkirch, en banlieue de Strasbourg.
"Il y a un effet de groupe : c'est à celui qui allumera le plus gros pétard et le gardera le plus longtemps en main. Et puis l'alcool n'arrange rien, bien sûr", déplore le médecin.
Le 31 décembre, les effectifs de son équipe seront doublés. "On sera tous sur le pied de guerre. Les gens vont arriver en grand nombre, à partir de minuit et quart. Nous nous attendons à des lésions graves. Des vies foutues, à cause d'accidents idiots!"
Le préfet, de son côté, affiche un optimisme mesuré. Il y a deux ans, à cause du bruit "on ne pouvait pas se parler place Kléber", au centre de Strasbourg, observe-t-il. "L'an dernier, il y a eu déjà un peu moins de pétards et (cette année) j'espère qu'on va finir par entendre les gens se souhaiter la bonne année".
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