Une navrante image de Noël et puis s'en vont. Des grillages installés le 24 décembre sur neuf bancs publics d'une place d'Angoulême pour décourager les SDF alcoolisés et dealers, ont été démantelés jeudi soir "provisoirement" et "par mesure de sécurité", mais après une notable vague d'indignation.
Les grillages, "plus précisément des gabions" destinés à recevoir des pierres ou galets, souligne la mairie, ont été enlevés vers 22H30 jeudi car des adolescents s'étaient introduits dans l'un d'eux en fin d'après-midi, a précisé à l'AFP Antoine Truffaux, directeur de cabinet du maire UMP.
Les grillages devraient être réinstallés ultérieurement, "en fonction de la date qui sera garantie pour la livraison des galets", a ajouté M. Truffaux, ajoutant que la mairie conserve l'objectif de condamner ces bancs et d'en faire un aménagement paysager "minéral".
La "réflexion va se poursuivre avec les commerçants et riverains pour trouver une solution satisfaisante pour cette place et une réponse à leurs problématiques", a estimé pour sa part le maire Xavier Bonnefont, déplorant l'"image détestable" d'Angoulême véhiculée par un "acharnement" médiatique de 48 heures, qui méconnaît les "valeurs" sociales de la municipalité.
La pose, la veille de Noël, de grillages donnant une image de bancs "en cage" avait surpris plus d'un Angoumoisin et suscité des flots de réactions sur les réseaux sociaux et le site de la Charente Libre. Parmi les commentaires, des félicitations pour une mesure perçue comme une réaction aux incivilités et à la mendicité agressive, mais aussi l'indignation face à un aménagement ressenti comme honteux.
- 'Regrets' sur le timing -
Depuis mercredi, la mairie a assumé vouloir condamner ces bancs adossés à la verrière d'une galerie marchande et qui, à cet endroit précis, étaient "utilisés quasi-exclusivement par des personnes qui se livrent à une alcoolisation récurrente, tous les jours", selon l'adjoint chargé de la sécurité, Joël Guitton.
Elle a dit agir en réponse aux doléances de commerçants et riverains, et souligné que la mesure, provisoire, s'inscrivait dans un dispositif "global" incluant vidéo-surveillance et médiation sociale auprès de SDF. Elle a aussi rappelé que 23 bancs restaient accessibles sur l'esplanade, des centaines d'autres en ville.
Vendredi, la mairie a néanmoins dit regretter "vivement" que les grillages aient été installés la veille de Noël, un symbole malheureux. Elle a imputé ce timing inopportun à un "manque de coordination" entre l'entreprise qui "a cru bien faire" en livrant les grillages par anticipation avant de fermer pour les Fêtes, et celle qui devait livrer les galets, début janvier en principe.
"Cet aménagement est en cours et je comprends qu'il puisse, en l'état, susciter l'interrogation de certains de nos concitoyens. Je regrette que les travaux aient commencé à la veille de Noël", écrivait jeudi sur Facebook M. Bonnefont, le maire de 35 ans qui, en mars, a ravi la mairie au PS.
- La théorie du 'plot' -
L'aspect sinistre de bancs "encagés", et le symbole d'exclusion en plein Noël - ainsi qu'une actualité par ailleurs atone - avaient propulsé jeudi des caméras de télévision sur l'esplanade du Champ de Mars. Plutôt déserte, comme on peut s'y attendre un 25 décembre.
Quelques anonymes avaient apposé des panneaux moqueurs sur les grillages, comme "Ca c'est Noël à Angoulême, merci la mairie !" Et deux adolescents, sans doute aidés d'adultes avec des pinces coupantes, ont réussi a se glisser dans une des cages, le temps d'une photo postée sur les réseaux sociaux.
Une réaction parmi d'autres a pu retenir l'attention de la municipalité: celle du journaliste-écrivain Denis Robert, qui dans un mail cosigné de trois dessinateurs de renom dont Lefred-Thouron, demandait à la mairie de retirer les grilles en vue du prochain festival de BD d'Angoulême (29 janvier-1er février), afin d'éviter "des embarras et des manifestations supplémentaires de notre désarroi".
Et le Champ de Mars dans tout ça? S'il est notoire à Angoulême qu'un coin de l'esplanade a vu ces dernières années des incivilités, trafics, bagarres, parfois avec arme, difficile d'échapper à l'idée que condamner les bancs ne ferait que déplacer le problème. "Les politiques ne peuvent pas régler le problème aujourd'hui, mais le déplacer, moi ça m'intéresse () Il fallait réagir", estimait Thierry Courmont, président des commerçants de la galerie.
Ironie de l'histoire: ces neuf bancs, que des curieux s'arrêtaient du coup pour observer vendredi matin, n'étaient pas censés être des bancs. Il s'agissait initialement de gros plots en béton, installés pour éviter qu'une voiture ne vienne heurter la verrière. C'est après qu'ils furent habillés de bois. Et donc, peut-être bientôt de pierres.
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