L'Australie rendait mardi un hommage ému aux deux otages tués par un déséquilibré islamiste la semaine dernière à Sydney à l'occasion de services funéraires célébrés sous le sceau de l'unité entre les communautés.
Tori Johnson, 34 ans, et Katrina Dawson, 38 ans, ont été tués par balles dans la nuit du 15 au 16 décembre lors de l'assaut du Lindt café à Sydney où Man Haron Monis, un homme d'origine iranienne au passé violent, avait séquestré 17 employés et clients.
Il les avait contraints à déployer sur la vitrine du café un drapeau noir où était inscrit en caractères arabes la "shahada", ou profession de foi musulmane, un drapeau souvent repris à leur compte par des groupes jihadistes.
Il avait récemment posté un message sur son site internet afin de prêter allégeance au "calife des musulmans", ce qui pourrait désigner le chef de l'organisation Etat islamique (EI) en Irak et en Syrie, Abou Bakr al-Baghdadi.
Monis a trouvé la mort dans ce drame d'autant plus traumatisant pour les Australiens que, si des dizaines d'entre eux ont péri dans les attentats du 11 septembre 2001 et de Bali (Indonésie) en 2002 et 2005, ils ont été largement épargnés par le terrorisme sur leur sol.
Les obsèques de Tori Johnson, gérant du Lindt café, ont été célébrées dans l'intimité mardi matin en l'église St Stephens de Sydney, à quelques pas seulement du lieu de la prise d'otage. Son cercueil blanc était porté par des proches vêtus de noir. Johnson a été élevé au rang de héros dans la presse nationale pour être tombé sous les balles du forcené qu'il tentait de désarmer. Cette information n'a pas été confirmée par les enquêteurs.
Le Premier ministre de l'Etat de Nouvelle-Galles du Sud, Mike Baird, et le chef de la police de l'Etat, Andrew Scipione, dont la famille se trouvait à l'intérieur du Lindt café quelques instants avant l'irruption du forcené, ont assisté à la cérémonie religieuse.
- 'Entre le mal et le bien, existe un jardin' -
Dans un message d'apaisement et en mémoire de leur fils, la famille Johnson a choisi de citer Djalal Ad-Din Rumi, le poète mystique de langue persane, sur le carnet de messe: "Quelque part entre le bien et le mal, existe un jardin. Je vous y retrouverai".
Malgré la condamnation univoque de la prise d'otages par plus de 40 organisations musulmanes avant même son épilogue, des incidents visant des personnes d'origine étrangère, ou perçues comme tel, ont été rapportés par la police qui a dénoncé des actes de "haine raciale".
Une cérémonie du souvenir devait également être organisée ce mardi pour l'autre otage décédé, Katrina Dawson, une avocate et mère de famille. La date et le lieu de ses funérailles n'ont pas été dévoilés.
Près du café, des milliers d'anonymes ont déposé fleurs, lettres et dessins. Une semaine après la tragédie et à l'approche d'une tempête, les autorités ont décidé de les déplacer et des bénévoles de la Croix-Rouge s'affairaient respectueusement mardi matin.
"Nous discuterons avec les familles, au moment opportun, de l'édification d'une stèle permanente", a déclaré le Premier ministre de l'Etat, Mike Baird.
Cette journée de recueillement n'escamote pas pour autant le débat suscité par les conditions dans lesquelles le forcené avait bénéficié d'un régime de liberté sous caution alors qu'il était inculpé de complicité de meurtre et mis en cause dans de multiples affaires de délinquance sexuelle.
Le contrôle judiciaire de la compagne de Monis, accusée d'avoir tué l'ex-épouse de celui-ci en lui portant dix-huit coups de couteau, a été révoqué lundi et la jeune femme de 35 ans a été incarcérée.
Le Premier ministre australien Tony Abbott a ordonné l'ouverture d'une enquête pour faire la lumière sur d'éventuels dysfonctionnements judiciaires, estimant que la prise d'otages avait été une "atrocité évitable".
Bien connu des services de police, Man Haron Monis ne figurait pas sur les listes des cibles surveillées par le contre-terrorisme alors qu'il avait été condamné pour avoir envoyé des lettres d'insultes aux familles de soldats australiens tués en Irak ou en Afghanistan.
Engagée aux côtés des Américains dans la lutte contre les combattants de l'EI, l'Australie avait relevé en septembre son niveau d'alerte face à la menace terroriste représentée par les jihadistes de retour d'Irak et de Syrie.
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