Les Tunisiens votaient dimanche pour élire leur président après une transition parfois chaotique de quatre ans dans ce pays où les tensions restent réelles, un homme armé ayant été tué dans la nuit par des militaires après une tentative d'attaque.
Les quelque 5,3 millions d'électeurs ont le choix pour ce deuxième tour entre le président sortant Moncef Marzouki, 69 ans, et le favori Béji Caïd Essebsi, 88 ans et chef du parti anti-islamiste Nidaa Tounès, victorieux aux législatives d'octobre.
A 14H30 (13H30 GMT), la participation s'établissait à 36,8% en Tunisie.
Des dizaines de milliers de militaires et policiers ont été déployés pour assurer le bon déroulement du scrutin alors que la Tunisie est confrontée depuis la révolution de 2011 à de multiples attaques, notamment le long de la frontière avec l'Algérie, attribuées à la mouvance jihadiste.
Dans la nuit, une unité a été attaquée par un "groupe armé" devant une école de la région de Kairouan (160 km au sud de Tunis) où du matériel destiné aux élections était stocké, mais les autorités se sont refusées à évoquer la piste jihadiste. Un assaillant a été tué et trois autres arrêtés, selon le ministère de la Défense.
"Ce qui s'est passé hier n'a pas d'ampleur (). Au niveau sécuritaire, les choses se passent plutôt très bien. Je peux vous dire que nous sommes préparés à toutes les urgences", a dit à l'AFP le Premier ministre Mehdi Jomaa.
L'incident intervient quelques jours après que des combattants tunisiens ayant rejoint le groupe Etat islamique ont revendiqué les assassinats des personnalités anti-islamistes Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi en 2013, qui avaient plongé la Tunisie dans une crise politique profonde.
Ils ont aussi appelé au boycott du scrutin et menacé de nouvelles violences.
Les autorités se veulent rassurantes sur le bon déroulement du vote, qui s?achèvera à 18H00 (17H00 GMT). Les résultats pourraient être connus dès lundi soir selon l'instance électorale (ISIE), qui a cependant jusqu'au 24 décembre pour annoncer l'identité du président pour les cinq prochaines années.
- 'La dictature, c'est fini' -
Le vainqueur deviendra le premier chef d'Etat tunisien élu librement depuis l'indépendance en 1956. Habib Bourguiba, le premier président, et Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011, avaient constamment eu recours à la fraude ou au plébiscite, et M. Marzouki avait été élu par l'Assemblée constituante à la faveur d'un accord politique avec les islamistes d'Ennahda.
La presse tunisienne a salué un jour "historique" qui doit achever de doter le pays berceau du "Printemps arabe" d'institutions pérennes après des législatives déjà considérées comme libres par la communauté internationale.
La campagne a vu les deux finalistes s'affronter sur un ton acrimonieux agrémenté d'insultes.
Moncef Marzouki s'est présenté en défenseur de la révolution face au retour des tenants de l'ancien régime, accusant son adversaire de préparer des fraudes tout en l?égratignant sur son âge.
Béji Caïd Essebsi, qui a servi Bourguiba comme Ben Ali avant d'assurer plusiers mois la fonction de Premier ministre après la révolution, s'est posé en homme providentiel à même de réparer les dégâts causés par Ennahda, au pouvoir de 2012 à début 2014, et leur allié M. Marzouki. Il a qualifié son concurrent "d'extrémiste" et lui a prêté le soutien des jihadistes.
"Le jeu démocratique nécessite que chacun de nous accepte le résultat du vote avec un esprit sportif", a cependant souligné après avoir voté M. Marzouki.
Des Tunisiens ont regretté le manque de retenue des candidats mais estiment que ce scrutin reste la clé pour une sortie par le haut de la transition post-révolutionnaire, à l'inverse de pays comme la Libye, la Syrie ou l'Egypte.
"Nos candidats, nos politiques ne sont peut-être pas les meilleurs, mais on avance, la dictature c'est fini", estime ainsi Mohamed Taïeb, épicier à Tunis.
Les pouvoirs du président ont été limités dans la Constitution adoptée en janvier pour éviter un retour à l'autoritarisme.
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