Laïcité contre traditions? Le tribunal administratif de Montpellier, saisi en référé, a estimé vendredi qu'il n'y avait pas d'urgence à statuer et a rejeté une demande d'enlever la crèche de Noël installée à l'hôtel de ville de Béziers par le maire Robert Ménard, proche du FN.
Les nombreuses collectivités qui invoquent culture ou racines chrétiennes pour installer ces crèches contestées par les défenseurs de la laïcité mais admises par une majorité de Français (71% selon un sondage Ifop pour Dimanche Ouest-France) n'ont pas encore gagné.
A Melun, dans une affaire similaire, le TA doit rendre sa décision lundi. Et dans cette affaire, le rapporteur public, régulièrement suivi par le tribunal, s'est prononcé en faveur de la désinstallation d'une crèche qui existe depuis des années.
Fin novembre, c'était le tribunal administratif de Nantes qui avait enjoint le conseil général de la Vendée, vieille terre de tradition catholique, de démonter sa crèche de la Nativité. La collectivité a fait appel.
A Montpellier, "la requête a été rejetée pour défaut d'urgence. La question de fond sera donc tranchée d'ici un an au regard des délais habituels de la juridiction", a commenté Me Sophie Mazas, défenseur de la Ligue des droits de l'homme et d'un Biterrois, à l'origine de l'action contre la ville de Béziers.
Dans un jugement de cinq pages, la juge Marianne Hardy a justifié sa décision par "l'absence de circonstances particulières qui auraient pu résulter" de la crèche, "notamment de troubles à l'ordre public".
"L'illégalité de la décision litigieuse, à supposer établie, ne caractérise pas davantage une décision sans attendre le jugement de la requête au fond", a ajouté la magistrate pour laquelle de surcroît, la preuve de l'atteinte "aux principes de laïcité et de neutralité du service public" n'a pas été apportée à l'audience.
Aux yeux de Me Mazas, une crèche de la Nativité, à l'inverse d'une crèche provençale avec seulement des santons, est bien "une atteinte à la laïcité" car elle "symbolise" la naissance du Christ, un événement "au c?ur de la religion chrétienne".
- Emblème religieux -
Une crèche de la Nativité est une violation de la Constitution ainsi que de la loi du 9 décembre 1905 consacrant la séparation des Eglises et de l?Etat, a affirmé l'avocate.
L'installation d'une crèche "viole la liberté de conscience des administrés et des requérants qui n'ont pas à voir s'imposer la religion du maire ou la religion censée avoir été dominante à Béziers", a-t-elle fait valoir, rappelant que M. Ménard avait déjà imposé une messe pendant la dernière Feria estivale.
Cette célébration religieuse avait d'ailleurs été critiquée par certains responsables de l?Eglise. Ils avaient rappelé que tous les catholiques n'aimaient pas la corrida.
Pour la ville de Béziers, Me Raphaële Hiault-Spitzer avait contesté la validité de l'action. Surtout elle avait assuré que cette crèche n'a "rien de cultuelle mais qu'elle "est culturelle" et ne contrevient donc pas à la loi de 1905 qui interdit les emblèmes ("la croix, le foulard) ou les signes religieux.
"La crèche n'est pas prescrite par le Droit canon. Elle n'est pas installée par une volonté de prosélytisme. Elle est là parce qu'elle fait partie de la tradition", avait-elle affirmé, ajoutant qu'elle s'inscrit aussi dans "le cadre du Noël occitan".
A Melun, les arguments défendus dans les deux camps ont été quasiment les mêmes. Mais pour le rapporteur public, une crèche de la Nativité a bien une connotation religieuse.
"Il s'agit bien, à notre sens, d'un emblème religieux, où la symbolique est affirmée, de plus, par le bâton porté par l'un des rois mages en forme de crosse, attribut des évêques dans la religion catholique", a-t-il expliqué, recommandant la désinstallation de la crèche.
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