Le marathon budgétaire s'est achevé jeudi au Parlement, mais les divisions à gauche, notamment entre socialistes, et la pression de la Commission européenne pour réduire le déficit augurent d'une entrée en 2015 délicate pour le gouvernement.
Après les ultimes navettes avec le Sénat majoritairement à droite, trois textes budgétaires ont été votés définitivement à main levée dans une Assemblée dégarnie mais qui avait le dernier mot. Conclusion de 107 heures de débats dans l'hémicycle du Palais Bourbon sur plus de 1.600 amendements, dont près de 500 adoptés.
Le premier texte, le projet de budget 2015, comprend un peu plus de la moitié des 21 milliards d'euros d'économies annoncés (le reste relevant du budget de la sécurité sociale définitivement voté début décembre) mais aussi la suppression de la première tranche d'impôt sur le revenu. Il a rencontré l'opposition de l'UMP, de l'UDI et du Front de gauche, le soutien de la majorité du PS, les réticences de certains socialistes "frondeurs", de beaucoup d'écologistes et parfois des radicaux de gauche.
Le texte doit encore être validé d'ici la fin de l'année par le Conseil constitutionnel, que l'UMP va saisir.
Dans la foulée, les députés ont voté le budget rectificatif 2014, qui comporte des ajustements de crédits mais aussi de nouvelles économies et taxes (résidences secondaires, banques et assurances, grandes surfaces, etc) pour compenser de moindres rentrées fiscales et le dérapage de certaines dépenses, militaires ou sociales.
Ils ont conclu par la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques sur 2014-2019, dans laquelle le gouvernement a abaissé ses prévisions de déficit.
Vantant "une maîtrise de la dépense" inédite, le gouvernement a récusé, durant trois mois de discussions budgétaires, toute "austérité" et martelé que les économies préservaient les priorités comme l'emploi, l'éducation ou la sécurité.
- Fractures à gauche -
Marqué par de nouveaux zigzags, dont l'abandon de l'écotaxe au grand dam des écologistes, ces débats ont confirmé les fractures à gauche, à l'approche d'une année d'élections et d'un congrès du PS.
Les défenseurs de la politique gouvernementale parient sur un soutien massif aux entreprises (CICE, Pacte de responsabilité) pour faire redémarrer l'économie et baisser un chômage massif. Ils disent entrevoir des signaux positifs.
Les contestataires au PS, confortés par les anciens ministres Benoît Hamon et Aurélie Filipetti et par les prises de position de Martine Aubry, réclament une réorientation en faveur des ménages et de l'investissement public. Des écologistes ont régulièrement convergé dans ce sens et choisi aussi l'abstention.
Le Front de Gauche n'a cessé de dénoncer une "obsession de baisse des dépenses publiques" alimentant une spirale récessive, autant qu'un "jeu de rôles" entre Paris et Bruxelles au profit d'une politique "libérale".
La droite a jusqu'au bout reproché au gouvernement "un dérapage des déficits" et la "mise sous tutelle" par Bruxelles, mais aussi des "coups de rabot" parfois dommageables, notamment à la Défense, au lieu de "réformes structurelles".
Et l'UMP comme l'UDI ont ironisé sur la promesse de François Hollande qu'il n'y aura plus de nouvelle hausse d'impôts à partir de 2015 en dehors de décisions déjà annoncées et dénoncé la poursuite du "matraquage fiscal" des ménages et des entreprises.
Majoritaire au Sénat, la droite a voté les textes budgétaires après les avoir revus et corrigés pour afficher ses choix, par exemple en coupant dans les crédits de l'Aide médicale d'Etat ou en limitant les emplois aidés.
Le gouvernement, qui table désormais sur un déficit public en légère baisse à 4,1% en 2015 après 4,4% en 2014, avait initialement promis de revenir sous 3% dès 2015, avant de repousser l'échéance pour éviter de casser une reprise de l'activité. Dans une Europe sous la menace de la déflation, la Commission européenne doit décider si elle accorde un deuxième délai, après celui obtenu en 2013.
Bruxelles a accordé un dernier sursis à la France, comme à l'Italie et la Belgique, en renvoyant au printemps son verdict sur leurs budgets, mais en exigeant plus d'efforts.
Paris a déjà dégainé des "mesures nouvelles" pour réduire le déficit de 3,6 milliards en 2015. Mais la chancelière allemande conservatrice Angela Merkel a récemment rajouté à la pression, comme l'agence Fitch Ratings, qui a encore abaissé la note française. Le gouvernement "assume ses choix", a répliqué Manuel Valls.
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