Les Etats-Unis et Cuba ont engagé mercredi un rapprochement spectaculaire après des décennies de tensions héritées de la Guerre froide, suscitant l'espoir des Cubains sur l'île, avec les promesses d'un rétablissement des relations diplomatiques et d'une plus grande coopération économique.
"Todos somos americanos" (Nous sommes tous américains) a lancé Barack Obama lors d'une allocution qui devrait marquer son passage à la Maison Blanche.
"Il y a une histoire compliquée entre les Etats-Unis et Cuba () mais l'heure est venue d'entamer un nouveau chapitre", a ajouté le 44e président des Etats-Unis, constatant sans détour l'échec d'un demi-siècle d'isolement du régime communiste.
Au même moment, à La Havane, son homologue cubain Raul Castro confirmait cette percée historique, tout en soulignant que la question de l'embargo économique, imposé à Cuba par John F. Kennedy en 1962, n'était pas résolue. M. Obama a demandé un débat, qui s'annonce déjà houleux, avec le Congrès américain sur la levée de cette mesure "inscrite dans la loi".
Dans les rues de La Havane, la joie et l'espoir étaient sur toutes les lèvres. "Notre vie à tous va changer", s'est exclamé avec enthousiasme Ernesto Pérez, cuisinier cubain de 52 ans.
Beaucoup de Cubains ont appris la nouvelle sur leur lieu de travail, certains organisant des réunions spontanées pour partager leur joie.
Amelia Gutiérrez, employée de banque enceinte de sept mois, se réjouit que son fils "n'aura pas à vivre dans la même tension".
"Cela pourrait ouvrir beaucoup de portes, surtout en matière de commerce", veut croire Marlon Torres, étudiant de 16 ans.
Rappelant que certains Cubains ont "travaillé très dur" pour provoquer ce changement, l'homme d'affaires cubano-américain Hugo Cancio, directeur de la revue OnCuba, voit "le début d'un nouveau rêve".
- Négociations secrètes -
MM. Obama et Castro se sont entretenus par téléphone pendant près d'une heure mardi et la Maison Blanche n'a pas exclu une visite de M. Obama à Cuba.
Le pape François, personnellement impliqué dans ces négociations menées dans le plus grand secret depuis le printemps 2013, a salué une "décision historique", louant le rapprochement entre deux pays séparés seulement par les 150 km du détroit de Floride.
Le secrétaire d'Etat américain John Kerry va entamer "immédiatement" des discussions en vue du rétablissement des relations diplomatiques avec ce petit pays des Caraïbes, interrompues depuis 1961.
Perspective longtemps impensable, les Etats-Unis vont par ailleurs ouvrir une ambassade à La Havane "dans les mois à venir", et Barack Obama n'a pas exclu non plus de se rendre à Cuba: "Je n'ai pas de projet particulier à ce propos pour le moment, mais voyons comment les choses évoluent", a affirmé le président américain dans une interview à ABC News.
Parmi les mesures annoncées pour favoriser les échanges économiques, les Américains pourront désormais utiliser leurs cartes de crédit à Cuba et les institutions américaines pourront ouvrir des comptes dans les institutions financières cubaines. L'exportation de certains matériels de télécommunication sera aussi permise, dans le but de développer internet sur l'île.
Les voyageurs américains pourront par ailleurs rapporter depuis Cuba jusqu'à 100 dollars de tabac, ce qui inclut, bien sûr, les célèbres cigares cubains. Si les voyages touristiques indépendants restent à ce stade interdits, nombre de procédures seront assouplies pour les chercheurs, les enseignants ou les journalistes.
Selon un responsable américain, l'ancien président Fidel Castro, qui a cédé la place à son frère Raul en 2006, n'a pas été impliqué dans les discussions.
Les pays latino-américains, même les plus critiques envers les Etats-Unis, ont applaudi mercredi ce développement, le Vénézuélien Nicolas Maduro allant jusqu'à saluer "le geste courageux" de Barack Obama.
- Signes de détente -
Cette annonce historique est intervenue quelques heures après la libération d'Alan Gross, un Américain de 65 ans détenu depuis cinq ans à La Havane. Washington a toujours conditionné une détente avec Cuba à la libération de cet ancien contractuel de l'agence fédérale américaine pour le développement international (USAID). Arrêté le 3 décembre 2009 à Cuba, Alan Gross avait été condamné en 2011 à 15 ans de prison pour avoir introduit du matériel de transmission satellitaire interdit dans l'île communiste.
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