Le gendarme japonais des installations atomiques a jugé mercredi deux réacteurs supplémentaires "techniquement" aptes à redémarrer, une décision qui va dans le sens espéré par le Premier ministre Shinzo Abe dont l'orientation pro-nucléaire a été avalisée nolens volens par des citoyens démobilisés.
L'autorité nippone de régulation nucléaire estime que les unités 3 et 4 de la centrale de Takahama (ouest du Japon) sont "conformes" aux nouvelles exigences techniques légales, ce qui signifie qu'elles devraient obtenir sous peu leur certification de sûreté indispensable avant une réactivation probablement courant 2015.
Takahama 3 et 4 répondent correctement aux risques de situation critique découlant d'une catastrophe naturelle (séisme, tsunami, éruption volcanique), d'un accident d'avion ou d'une attaque terroriste, selon l'autorité garante de la sûreté des installations, en vertu de normes durcies après l'accident de Fukushima en mars 2011.
C'est seulement le deuxième couple de réacteurs du Japon dont l'examen de conformité à ces standards entrés en vigueur en juillet 2013 est terminé.
Jusqu'à présent, seules les tranches 1 et 2 de la centrale Sendai (sud-ouest) ont obtenu leur certificat technique, mais elles n'ont toujours pas été remises en exploitation en raison de délais de procédure, bien qu'ayant également reçu le feu vert politique.
Les 48 réacteurs du Japon sont toujours arrêtés (sans compter les 6 saccagés de la centrale accidentée Fukushima Daiichi) et aucun ne peut être relancé sans cette approbation, préalable indispensable.
L'exploitant du site de Takahama, Kansai Electric Power, qui alimente une partie de l'ouest de l'archipel était, avant le désastre de Fukushima, la plus dépendant à l'énergie nucléaire. Il est on ne peut plus pressé de remettre en marche une partie au moins de ses réacteurs.
- Abe profite de la démobilisation -
"Tout accident grave à Takahama serait dévastateur pour les personnes et l'économie de la région du Kansai (ouest), mais la compagnie tient à redémarrer ses réacteurs, et le régulateur est en train de faire tout son possible pour l'aider malgré le danger pour la sécurité de la population", s'est énervée Kazue Suzuki, de l'organisation Greenpeace Japon, dans un commentaire adressé à l'AFP.
L'autorité se borne toutefois à dire si les installations sont techniquement sûres sur la base de connaissances scientifiques. Il revient ensuite aux dirigeants politiques locaux et nationaux de décider du redémarrage.
Puisque la volonté du gouvernement de droite de Shinzo Abe est de "relancer tous les réacteurs jugés sûrs par l'autorité de régulation", l'étape la plus délicate à franchir pourrait être l'opposition d'une partie de la population des environs.
"Il y a une résistance publique et politique locale contre le redémarrage des deux réacteurs Takahama dans la région et les préfectures limitrophes", souligne Greenpeace qui compte sur l'opposition des gouverneurs de Shiga et Kyoto (préfectures dont une partie est située à moins de 30 km du site), ainsi que sur des délais dus à des élections régionales en avril 2015, à commencer par celle du gouverneur de Fukui dont l'accord est obligatoire pour la relance de Takahama.
Reste que si, selon tous les sondages, la majorité des citoyens japonais sont opposés à l'énergie nucléaire, la mobilisation contre leur relance s'est notablement affaiblie.
Cette question n'était d'ailleurs pas, tant s'en faut, le principal enjeu des élections législatives de dimanche, scrutin remporté haut la main par le Parti Libéral-Démocrate (PLD) du Premier ministre Abe.
Ce dernier, qui avait sciemment provoqué cette sorte de referendum pour ou contre sa politique économique "abenomics" (sachant qu'il n'y avait aucune autre proposition en face), a beau jeu de clamer depuis lundi avec l'assurance du vainqueur que les citoyens ont tout approuvé en bloc, y compris ses orientations pro-nucléaires. Et ce même si l'abstention, près de 48%, n'a jamais été aussi élevée.
En attendant, selon les experts et à la grande satisfaction de M. Abe, les examens de sûreté vont à coup sûr s'accélérer du côté de l'autorité, qui commence à prendre le pli et peut réutiliser partiellement des données d'un dossier à l'autre.
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