La police turque a lancé dimanche une nouvelle opération coup de poing contre les partisans du rival du Président Recep Tayyip Erdogan, le prédicateur islamiste Fethullah Gülen, visant notamment le journal Zaman proche du religieux.
Cette nouvelle rafle survient deux jours après que le président turc a annoncé une nouvelle opération contre les "forces du mal" activées depuis son exil aux Etats-Unis par son ennemi juré, qu'il accuse d'avoir orchestré l'an dernier le lancement d'une enquête pour corruption contre des membres de son cercle le plus proche.
La police anti-terroriste a mené dimanche matin des opérations dans treize villes de Turquie dont Istanbul, arrêtant au total au moins 24 personnes, principalement des journalistes, dont Ekrem Dumanli, le rédacteur en chef de Zaman, l'un des grands quotidiens en Turquie, selon les médias.
Samedi matin une foule de protestataires rassemblée devant l'immeuble de Zaman, situé à la périphérie d'Istanbul, avait momentanément empêché l'interpellation d'Ekrem Dumanli, créant la confusion et obligeant la police à quitter l'immeuble sans arrêter aucun des employés du journal.
"Une presse libre ne peut être réduite au silence", scandait la foule en soutien à M. Dumanli qui tentait de mettre au défi la police de venir l'arrêter. "La personne à arrêter attend ici. Je vous en prie, venez me chercher. Je vous attends ici", a lancé M. Dumanli au policiers.
Des mandats d'arrêts ont été délivrés contre 32 personnes au total, accusées entre autres de "former un gang pour tenter d'attenter à la souveraineté de l'Etat", a indiqué l'agence gouvernementale Anatolie.
Visés eux aussi, les dirigeants d'une chaîne de télévision proche de Fetullah Gulen, dont un directeur, des producteurs et des journalistes ont également été arrêtés, a précisé Anatolie.
Vendredi, le président Erdogan, déterminé à neutraliser les partisans de son ennemi, avait promis de les "poursuivre jusque dans leurs repaires".
- "Jusque dans leurs repaires " -
"Nous ne sommes pas seulement confrontés à un simple réseau, mais à l'un de ceux qui sont le pion des forces du mal dans le pays et à l'étranger", a-t-il affirmé. "Nous les poursuivrons encore dans leurs repaires. Quels que soient ceux qui se tiennent à leurs côtés, derrière eux, nous détruirons ce réseau et le forcerons à rendre des comptes", a ajouté l'homme fort de la Turquie.
En allusion aux partisans de Gülen, le Premier ministre Ahmet Davutoglua a renchéri : "Aujourd'hui, est un jour test. Ils vont tous payer pour ce qu'ils ont fait et leur comportement anti-démocratique".
Le régime qui dirige la Turquie depuis 2002 a l'hiver dernier déclaré la guerre au mouvement de M. Gülen, 73 ans, accusé d'avoir constitué un "Etat dans l'Etat" et comploté dans l'ombre pour provoquer sa chute.
Le mouvement Hizmet du prédicateur islamique a nié toute implication dans l'enquête pour corruption visant des proches du président.
Comme lors de presque toutes les précédentes interventions de ce genre - dont la plupart visaient des policiers - tous les détails des opérations avaient été publiées sur Twitter par un mystérieux utilisateur avant leur lancement.
La semaine dernière Fuat Avni avait prévenu que la police était sur le point d'interpeller quelque 400 personnes, sont 150 journalistes. Samedi soir il avait publié les noms de ces journalistes, dont certains de ceux qui ont été arrêtés.
Cette nouvelle rafle est la dernière d'une série de vagues d'interpellations depuis juillet, organisées par le gouvernement contre ce que le président islamo-conservateur, Recep Tayyip Erdogan, dénonce comme un "Etat parallèle" au sein des forces de sécurité, visant la chute de son gouvernement.
Elle survient un an après le lancement le 17 décembre dernier d'une vaste enquête sur un scandale de corruption qui a conduit à l'arrestation d'une dizaines d'hommes d'affaires et d'hommes politiques, dont les fils de trois ministres du gouvernement Erdogan, alors Premier ministre.
M. Erdogan était parvenu à mettre un coup d'arrêt à cette enquête en procédant au limogeage de milliers de policiers et d'un certain nombre de juges et en faisant adopter des lois renforçant le contrôle de l'Etat sur l'appareil judiciaire et sur internet.
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