La taxe sur les transactions financières tant attendue par les ONG a désormais peu de chances de voir le jour en Europe, ou du moins pas en 2016 comme prévu, après l'échec de discussions lundi soir à Bruxelles entre les ministres des 11 pays participants.
La réunion qui s'est tenue en marge d'un Eurogroupe "s'est terminée sans résultat", a-t-on appris de source allemande. "On est seulement d'accord pour continuer à travailler. Mais il n'y a aucun calendrier, et les positions ne se sont pas rapprochées", a ajouté cette source.
La mise en place par 11 pays européens d'une taxe sur les transactions financières (TTF) au 1er janvier 2016, comme ils s'y étaient engagés en mai, paraît désormais bien peu probable: il aurait fallu pour cela parvenir à un accord politique avant la fin de cette année. Un délai d'un an est en effet jugé nécessaire avant que le dispositif puisse entrer en vigueur.
Pour débloquer le dossier, le ministre français des Finances, Michel Sapin, avait fait en novembre une proposition consistant à ne taxer que les actions et certains CDS (des contrats d'assurance contre le défaut de paiement d'une valeur), ceux qui ne sont pas compensés, expliquant qu'il s'agissait d'un outil spéculatif "particulièrement dangereux". Il avait fait valoir qu'un accord sur une première étape était préférable à l'absence de taxe.
"Je préfère une TTF qui aurait un produit limité au-delà des actions mais qui soit efficace et effective et qui progressera, plutôt qu'une très belle idée, mais qui restera dans les nuages", avait-il expliqué en novembre.
Mais le volontarisme affiché par la France --la taxe sur les transactions financières était une promesse de campagne de François Hollande-- n'a pas été suffisant pour convaincre ses partenaires.
- D'accord sur rien -
Plusieurs organisations non gouvernementales, dont Oxfam, ont même rendu la France responsable de l'impasse la semaine dernière, estimant qu'elle voulait imposer sa version d'une "taxe au rabais" afin de "protéger les intérêts du secteur financier français", là où notamment l'Allemagne et l'Autriche voudraient aller plus loin.
D'autres, comme la Belgique, qui applique déjà une taxe sur les opérations boursières, n'étaient guère enthousiastes face à un dispositif dont les recettes s'annonçaient finalement bien moindres que les 35 milliards d'euros évoqués initialement par la Commission européenne.
En France même, le projet de TTF est fortement contesté par la Fédération bancaire française, qui juge le projet nuisible à "l'objectif d'une place de Paris forte".
Et les pays de l'UE ne participant pas au projet ne tarissaient pas de critiques, à commencer par le Royaumme-Uni, craignant des retombées négatives pour la City et qui avait même déposé un recours devant la Cour de justice de l'UE, finalement rejeté.
Les onze pays participant à cette coopération renforcée sont l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, l'Espagne, l'Estonie, la France, la Grèce, l'Italie, le Portugal, la Slovaquie et la Slovénie.
Malgré d'innombrables réunions, ils n'ont réussi à se mettre d'accord ni sur l'assiette, ni sur le lieu de taxation (le lieu d'émission des titres ou celui où a lieu la transaction), ni sur l'affectation du produit de la taxe, que les ONG espéraient voir profiter à l'aide au développement et à la lutte contre les pandémies.
"En fait, ce n'est pas plus facile de se mettre d'accord à 11 qu'à 28", avait constaté, amer, un diplomate européen interrogé ces derniers jours sur les raisons de l'impasse.
Un succès aurait pourtant sans doute permis d'avancer aussi sur d'autres dossiers fiscaux, au moment où le scandale LuxLeaks d'évasion fiscale occupe le devant de la scène médiatique. Légiférer en matière fiscale au niveau européen exige en effet l'unanimité des 28, quasi impossible à atteindre.
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