La France se prépare à une épreuve test de sa capacité à concrétiser les réformes économiques promises à ses partenaires européens, sur fond de passe d'armes avec l'Allemagne, où la chancelière Angela Merkel lui a décoché dimanche un nouveau coup de griffe.
En attendant le verdict sur son budget 2015, repoussé par Bruxelles au printemps, le gouvernement socialiste français doit dévoiler mercredi un plan pour "déverrouiller l'économie", qui cristallise déjà les oppositions.
Mme Merkel, considérant comme "justifié" le répit accordé par la Commission européenne à la France pour le dérapage de ses finances publiques, a jugé insuffisantes les réformes engagées à ce stade.
"La Commission a aussi dit de façon claire que ce qui est jusqu'à présent sur la table n'est pas encore suffisant. Ce avec quoi je suis d'accord", a-t-elle déclaré au quotidien conservateur Die Welt.
appelé "Les réformes, on les fait en France, non pas pour faire plaisir à tel ou tel dirigeant européen, mais parce que c'est nécessaire pour la France", a répliqué dimanche soir le ministre français des Finances, MIchel Sapin.
Pour sa part, l'économiste français Jean Tirole, prix Nobel d'économie 2014, a appelé, depuis Stockholm, son pays à "suivre l'exemple" de l'Allemagne et la Suède, "qui ont connu des moments difficiles et ont fait beaucoup de réformes".
"Nous devons faire des réformes pour que les gens retournent au travail", a plaidé ce partisan d'une refonte en profondeur du marché de l'emploi français plombé par un taux de chômage record de 10,4%.
Travail du dimanche, assouplissement de l'accès aux professions réglementées (notaires, avocats, pharmaciens), libéralisation du transport par autocar, épargne salariale: le gouvernement vise large avec son projet de loi "sur l'activité et la croissance".
Avec le Premier ministre Manuel Valls, Emmanuel Macron, le jeune ministre de l'Economie âgé de 36 ans qui fait figure de symbole du virage social-libéral de l'exécutif, défend "un texte pour ceux qui veulent travailler, créer, produire, embaucher sur notre territoire".
- Loi 'fourre-tout' -
Mais déjà les critiques s'amoncellent à l'égard d'une loi qualifiée de "fourre-tout" par le numéro un du Parti socialiste (PS), Jean-Christophe Cambadélis.
Mesure emblématique, l'extension du travail dominical ou en soirée, aux règles très strictes en France, est aussi l'une des plus controversées.
Le gouvernement prévoit notamment, pour développer la fréquentation touristique et libérer le commerce, la création de "zones touristiques internationales", dans lesquelles le travail sera possible les dimanches et le soir jusqu'à minuit.
Il en espère un coup de fouet pour l'emploi dans un pays toujours première destination touristique au monde. Mais le projet ulcère tous les syndicats, et à Paris, première concernée, l'équipe municipale de gauche y est hostile.
Un sondage publié vendredi atteste de la sensibilité du sujet: près de deux tiers des Français (62%) s'y disent favorables à l'ouverture des magasins le dimanche, mais 60% rechignent à l'idée de travailler eux-mêmes ce jour-là, sauf importantes contreparties.
Notaires, huissiers, avocats, pharmaciens: les professions réglementées sont elles aussi très remontées contre la volonté du pouvoir de réformer leurs secteurs. Après une grève sans précédent fin septembre, elles prévoient de rassembler 50.000 manifestants mercredi pour réclamer le retrait du projet. La fédération UNAPL, rassemblant l'ensemble des professions libérales, a appelé à descendre dans la rue le 22 janvier, pour le début de l'examen de la loi devant l'Assemblée nationale.
Le gouvernement Valls ne dispose que d'une majorité étriquée à l'Assemblée où les frondeurs de l'aile gauche du PS, après s'être abstenus sur le vote du budget, menacent cette fois de voter contre la loi Macron.
Une des figures de la gauche du parti, la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann, a appelé samedi les parlementaires socialistes à rejeter un texte qui constitue "une remise en cause de tous les combats historiques de la gauche".
Le plan de réformes d'Emmanuel Macron arrive dans une période de tensions d'autant plus vives que le gouvernement est également à couteaux tirés avec le patronat, qu'il accuse de saborder par de perpétuelles surenchères sa politique d'allègement des charges des entreprises dans l'espoir de relancer l'emploi et l'investissement.
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