Deux jours après la mise au point de Manuel Valls, le bras de fer continue entre gouvernement et patronat: Michel Sapin et Emmanuel Macron ont appelé les patrons à investir et créer des emplois au lieu de manifester dans la rue.
"Je vois ces images () Ce n'est pas à la hauteur du débat, de l'enjeu", a ainsi estimé le ministre des Finances Michel Sapin sur i-Télé, opposant ces patrons qui manifestent aux "vrais chefs d'entreprise" concentrés sur la bonne marche de leur société.
Son collègue de l'Economie, Emmanuel Macron, a appelé les dirigeants patronaux à "prendre leurs responsabilités" et à conclure davantage d'accords de branche concernant les contreparties au pacte de responsabilité.
Il a fait la distinction entre les entrepreneurs et les "représentants du patronat qui ne sont pas contents et qui voudraient que l'on mette toujours plus d'argent ou de mesures".
"Nous, nous avons pris un risque politique qui n'était pas naturel pour un gouvernement de gauche", a-t-il insisté, en référence au Pacte de responsabilité et à l'allègement "de la fiscalité et des charges de 40 milliards d'euros" pour les entreprises.
"Mais quand vous faites le constat qu'il n'y a que deux accords de branches qui ont été signés et beaucoup de branches qui refusent de discuter, est-ce que j'ai deux secondes de crédibilité si je dis +tout va bien Madame la marquise+?", a-t-il demandé, avant de répondre lui-même par la négative.
Deux jours après les propos de Manuel Valls dénonçant les "provocations" de certains patrons, ces déclarations ministérielles, en particulier celles de M. Sapin, ont irrité les organisations patronales. La CGPME déplore ainsi, dans un communiqué, des "outrances verbales stériles et inutiles".
- Sondages favorables aux patrons -
Le Club des Entrepreneurs juge "scandaleux" les propos de M. Sapin. "Nous condamnons ce clivage artificiel qui vise à opposer les uns aux autres dans une période où la France a besoin de rassemblement et d?unité", fustige dans un communiqué ce réseau de créateurs et dirigeants d'entreprises, qui revendique 18.500 membres.
Les organisations patronales ont appelé depuis lundi à une semaine de mobilisation contre la fiscalité des entreprises, la durée minimale de travail de 24 heures hebdomadaires pour les nouveaux contrats à temps partiel, l'obligation d'informer les salariés en cas de cession de l'entreprise et l'entrée en vigueur partielle à partir du 1er janvier du compte personnel de prévention de la pénibilité, qui permettra aux salariés subissant des conditions de travail difficiles de partir plus tôt à la retraite.
Mercredi, la CGPME, le Medef et l'UPA ont distribué des sifflets aux quelque 3.000 participants d'un rassemblement à Lyon contre la politique économique du gouvernement.
Lundi, des petits patrons avaient installé de nombreux cadenas près du ministère de l'Economie et des Finances, pour symboliser 30 ans d'une politique qui a selon eux "bridé" l'économie.
Selon un sondage Odoxa pour BFM Business, Challenge et Aviva assurance, plus de six Français sur dix (64%) pensent que les patrons "ont raison de se mobiliser pour ce qu'ils appellent leur +souffrance et leur ras-le-bol+ contre la politique du gouvernement".
Un responsable du Medef, Thibault Lanxade, interrogé sur RMC a souligné que les Français "soutiennent et comprennent la mobilisation des patrons".
Il a dit ne pas comprendre les déclarations de M. Macron quant aux risques pris par le gouvernement de gauche en décidant des allégements de charge en faveur des entreprises: "Prendre des risques mais c'est son métier, il doit diriger le pays, faire en sorte que la situation économique se redresse."
Il a aussi contesté le chiffre donné par M. Macron sur le nombre de branches (deux seulement) ayant conclu des accords dans le cadre du Pacte de responsabilité. "Ce n'est pas vrai, il y a trois branches et il faut regarder leur poids, il y a notamment la métallurgie avec 1,8 million de salariés" et "les banques, un employeur extrêmement important en France, devraient signer un accord d'ici la fin de l'année", a-t-il dit.
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