L'enquête administrative, diligentée après la mort fin octobre de Rémi Fraisse sur le site du barrage contesté de Sivens, a écarté toute faute professionnelle des gendarmes, des conclusions qualifiées de mensonges par l'avocat de la famille du militant écologiste.
S'"il ressort clairement que la mort de Rémi Fraisse est imputable à l'explosion d'une grenade offensive", l'enquête, demandée début novembre par le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve à l'Inspection générale de la gendarmerie (IGGN), s'en remet à la justice "pour déterminer l'exacte responsabilité et le degré de responsabilité du lanceur".
C'est le chef de l'inspection générale de la gendarmerie nationale, le général Pierre Renault, qui a présenté mardi soir devant la commission des Lois de l'Assemblée nationale ces conclusions, très attendues après les manifestations contre les violences policières qui ont eu lieu ces dernières semaines.
"En l'état des informations recueillies dans cette enquête et au plan strictement administratif, je ne dispose pas d'élément permettant de caractériser une faute professionnelle", a-t-il déclaré lors de son audition.
L'IGGN estime que les enregistrements prouvent que les avertissements préalables au lancer de grenade ont été effectués et que le lanceur "démontre sa volonté d'éviter de blesser un manifestant en prenant la précaution d'utiliser une paire de jumelles pour vérifier si personne ne se trouve dans la zone".
Le rapport réaffirme que les autorités n'ont eu confirmation de la cause exacte de la mort que le mardi 28 octobre, après les résultats de police scientifique. Le ministre, qui avait entre-temps été accusé d'avoir tenté de cacher les faits, avait alors suspendu -avant d'interdire- l'usage des grenades offensives.
Interrogé par l'AFP, l'avocat de la famille de Rémi Fraisse, Me Arié Halimi, a estimé que "chaque phrase de cette audition est un mensonge". "La famille avait demandé la vérité au président de la République, elle est contrainte de constater que le mensonge est encore plus lourd et encore plus cynique", a affirmé Me Halimi.
"Le directeur de la gendarmerie nationale Denis Favier avait déjà déclaré qu'il n'y avait pas de fautes et qu'il soutiendrait ses hommes quoi qu'il arrive. Le général Pierre Renault lui a obéi", a-t-il ajouté.
- 'pas une surprise' -
L'enquête administrative s'appuie sur des entretiens par l'IGGN des autorités préfectorales et des gendarmes engagés mais aussi sur des documents et vidéos prises par la gendarmerie, qui ont été versées à l'information judiciaire.
En revanche, les auditions réalisées dans le cadre de l'enquête judiciaire, n'ont pas été utilisées par l'IGGN.
Ce rapport a été remis aux deux juges d'instruction toulousains chargés de l'enquête judiciaire.
Pour l'Inspection générale, la nuit où Rémi Fraisse est mort, "l'emploi de la force puis l'usage des armes se sont imposés très rapidement". Elle souligne toutefois que la préparation de la manifestation plus tôt dans l'après-midi du 25 octobre, "privilégiait la concertation avec les organisateurs et le souci d'apaisement".
Ces conclusions ne sont "pas une surprise", a réagi Ben Lefetey, porte-parole du Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Tester, qui regroupe les associations opposées au projet de retenue d'eau. "La gendarmerie couvre ses gendarmes, comme depuis le début. On attend beaucoup plus de l'enquête judiciaire", a-t-il déclaré.
Pour lui, "la question reste posée: pourquoi le gouvernement a pris la décision de faire prendre des risques à ses forces de l'ordre et aux manifestants pour garder un bout de grillage alors que le même gouvernement recommandait de suspendre le projet?".
Par ailleurs, l'IGGN dit avoir été saisie de 13 "signalements d'opposants" au barrage: 9 correspondent à des plaintes pour violences policières, une est inexploitable et trois n'ont pas fait l'objet d'un dépôt de plainte.
Devant la commission des lois, le général Renault est enfin revenu sur l'évacuation d'une caravane le 7 octobre avec le jet d'une grenade de désencerclement. L'IGGN a conclu "à une faute professionnelle grave", et demande à ce que le sous-officier soit sanctionné.
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