"Touchez celui-là il est dodu, n'est-ce pas?" Sourire aux lèvres, Jean-Christophe Bonoron invite le néophyte à tâter le sapin qui vient d'être saucissonné dans son filet d'emballage pour être vendu à Noël, avec d'autres de ses congénères sur une colline du Haut-Morvan.
Au milieu de ce nulle part qui ouvre sur un splendide panorama automnal, le bruit du sécateur hydraulique et les sonneries du téléphone portable de M. Bonoron, cultivateur et pépiniériste, rappellent que la coupe du sapin bat son plein.
Dans ce canton du parc naturel du Morvan, c'est la première production agricole: il ne s'agit pas de se "rater" pendant les quelques semaines de coupe. Près d'un million de résineux sont produits chaque année dans ce coin de Bourgogne, sur quelque 1.500 hectares. Soit le quart de la production hexagonale, derrière la Bretagne et Rhône-Alpes.
Début décembre, tout sera terminé et il sera temps pour Jean-Christophe Bonoron et sa femme de "monter" au marché de Rungis (Val-de-Marne) pour assurer la vente de leurs sapins, épilogue de semaines à rallonge qui laisseront le couple fourbu pour les fêtes de fin d'année.
"On fera quand même un sapin mais on aura du mal à veiller le soir du réveillon", rigole le pépiniériste qui s'enorgueillit de produire chaque année entre 25 et 30.000 arbres de Noël de "qualité".
Car il y a sapin et sapin. Un gouffre existe entre l'arbre décharné au branchage flapi, déniché in extremis sur un parking à 18h30 un 24 décembre, et le conifère haut de gamme qui a "du corps, de la branche". "Mon beau sapin" a aussi un "parfum" qui prend par la main petits et grands pour les faire chanter "quand par l'hiver, bois et guérets sont dépouillés de leurs attraits".
- Taillé, comme la vigne -
"Ce qui est beau, c'est le reflet bleuté. Ca veut dire qu'il n'y a pas de carence et qu'il a été bien alimenté", ajoute Vanessa Bonoron, l'épouse. "Comme on taille la vigne, on taille le sapin", complète-t-elle.
"La forme des arbres, ce n'est pas arrivé par la force du Saint-Esprit", abonde son mari. Compter ainsi 10 ans pour arriver à un "beau sapin" de 2 à 2,5 mètres de haut; 24 ans pour celui de 10 mètres qui trônera à partir de la mi-décembre dans la cour d'honneur de l'Elysée: cadeau en forme de coup de pub de l'Association française du sapin de Noël naturel.
Présidée par Frédéric Naudet, à la tête de 400 hectares dans le Morvan et premier producteur d'arbres de Noël du pays, celle-ci promeut le sapin "made in France". Avec un certain succès puisqu'en dépit de la crise, le marché du sapin naturel fait mieux que se maintenir.
Il s'en est vendu 5,6 millions en 2013, dont près de quatre millions cultivés dans l'Hexagone, le reste venant de Belgique ou du Danemark. Mieux, si le nombre global de foyers acheteurs de sapins a "tendanciellement" baissé en 2013 (-2% par rapport à 2012), ce recul n'a concerné que les sapins artificiels (14,5% du marché total), les naturels progressant à l'inverse de 3%.
"C'est un achat plaisir", résume M. Naudet qui axe aussi sa communication sur les effets positifs de cette production sur l'environnement, face à son "concurrent artificiel".
Au regard des 20% de ménages français qui ont acheté un sapin de Noël naturel en 2013, cette tradition née au XVIe siècle dans l'Europe protestante promet quelques belles perspectives économiques, d'autant que la vente en ligne décolle. "On a une belle marge de progression face aux taux record de nos voisins allemands et autrichiens", souligne M. Naudet: environ 90% des familles y fêtent Noël autour d'un arbre naturel.
En 2013, "le roi des forêts" dont on aime tant la verdure a généré un chiffre d'affaires de 141,4 millions d'euros.
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